lundi 7 septembre 2009

Attali, BHL, Minc, la liste Bilger


en passant lire la presse...
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Constatant sur France-info que Jacques Attali, BHL et Alain Minc figuraient parmi les personnalités les plus raillées et même « trollées » du Net Nicolas Poincaré
et David Abiker, ont demandé à BHL, invité pour présenter son site, s’il percevait une dimension antisémite dans cette détestation.
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BHL a répondu qu’il ne croyait pas le web antisémite. Mais il s’est autorisé une petite perfidie en évoquant une « liste de Philippe Bilger ».
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L’allusion ne pouvait sans doute pas être comprise par une très grande majorité d’auditeurs : elle concerne probablement la polémique surgie dans la foulée du procès Fofana, le CRIF, l’avocat Francis Szpiner et BHL lui-même ayant suspecté le procureur Philippe Bilger - qui a exigé et obtenu la peine maximale pour Fofana - de complaisance envers certains des prévenus. On ne s'étendra pas sur la formule et ce qu'elle signifie.
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Si Philippe Bilger a souvent brocardé BHL, et parfois Minc, il ne s'en est jamais pris à Attali. Dès lors qu'a voulu dire Lévy, et pourquoi, dans la même semaine, cibler Pierre Péan, Henri Guaino puis Philippe Bilger ?


Nous le saurons peut-être bientôt.
Mais l'idée de rapprocher ces trois intellectuels - Attali, BHL et Minc - mérite que l’on s’y arrête.
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Les trois personnalités ont-elles quelque chose en commun et quoi ?

Existe-t-il une cohérence dans leurs idées et leurs comportements ?

Qu’est ce qui peut donner envie de les rapprocher ?

Ceci tout d’abord qu’il s’agit de trois intellectuels médiatiques bénéficiant d’un a-priori très favorable dans les télévisions, les radios et la grande presse.
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illustration : "la penseuse" Galerie Burkin'art
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Il y a aussi parmi eux une véritable concordance de l'excellence scolaire : Attali est un X, Minc un énarque et BHL un normalien.

Un brelan d'as et un destin rêvé par toute mère française, juive ou pas!

On peut dire enfin qu'ils ont tous trois été les zélateurs pugnaces d’une mondialisation qu’ils jugaient, selon les moments, opportune, incontournable ou heureuse.

Bref, ils ont été les inventeurs de la pensée unique, ce qui les a désignés comme cibles dans la vie réelle comme sur Internet.
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Mais les différences sont peut-être tout aussi importantes que les ressemblances.

Ainsi, même si BHL semble s'être réconcilé avec Nicolas Sarkozy, seuls Attali et Minc lui rendent directement des services.
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De même leurs relations avec Israel et le judaïsme sont-elles fort différentes.

En tout cas, la crise actuelle semble agir comme une sorte de révélateur, au sens chimique du terme, sur leurs positionnements respectifs. C'est lorsqu'ils divergent que leur cas devient intéressant.

Pour Alain Minc, seule une petite partie du pays (10% dit-il) est réellement touchée par une crise qu’il perçoit avant tout comme psychologique et cyclique.

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Quant à BHL, on cherchera en vain dans ses écrits la moindre opinion sur un sujet économique qu’il évite soigneusement depuis des années.
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Les intellos au scanner de la crise

Pourquoi de telles divergences entre les trois hommes que tout semble rapprocher ?
Quand on s’efforce de répondre honnêtement à cette question, on est tenté d’en revenir à Marx - tout n'y est pas à jeter et Attali et Minc évoquent d'ailleurs souvent le barbu allemand - et à sa fameuse formule selon laquelle la vie (et non pas l'existence, comme l'ont traduit les révolutionnaires par la suite) détermine la conscience.
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Professionnellement, Alain Minc vit des précieux conseils qu’il dispense à des patrons du CAC 40. Vu de sa fenêtre, en effet, la crise est à relativiser : les multinationales réussissent parfaitement à externaliser leurs risques sur leurs salariés et leurs sous-traitants. Au contraire, la récession a permis aux grands groupes d’imposer des restructurations plus difficiles à faire passer en temps normal (d'où, d'ailleurs, l'excellente forme des Bourses).
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Et comme Alain Minc ne conseille aucune PME, il en conclut logiquement que tout ne va pas si mal.
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À l’inverse, BHL n’a pas vraiment de profession « monolihtique ».
Gagner sa vie n'a jamais été son premier souci. C’est un publiciste au sens que l’on donnait autrefois à ce terme, qui partage son temps entre un activisme international consacré à quelques grandes causes et l’écriture.
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La thématique des droits de l’homme veut ignorer l’économie.
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En vertu de quoi « penser » l’économie, ce qui est tout à fait à la portée de sa très grande intelligence, ne pourrait que gêner son action et risquerait même de le mettre en porte-à-faux.
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Par ailleurs, le philosophe est aussi actionnaire mais il considère que ses intérêts d’actionnaire relèvent de son existence privée.
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De son côté, Jacques Attali vit essentiellement de sa plume.
Pour lui, ce qui compte, c’est de se distinguer sur le marché encombré de la pensée contemporaine.
Il y réussit parfaitement en devenant, par conviction, le plus pessimiste des commentateurs de la conjoncture économique.
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Il nous en devient du coup presque sympathique.
La crise systémique que nous connaissons a touché tout autant, voire davantage, les intérêts des riches que ceux des pauvres et des classes moyennes : quand la bourse dégringole de 50%, les patrimoines suivent le mouvement baissier.
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En outre, nous ne sortirons de cette crise que si une partie des élites prend conscience de sa gravité. Jacques Attali semble parfois à l’avant-garde de cette prise de conscience nécessaire.
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On lui pardonnera sa collaboration au régime sarkozyste lors de sa présidence de la commission s’il parvient à aider les décideurs à mieux comprendre le monde qu’ils nous fabriquent.

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