samedi 6 décembre 2008

littérature mexicaine : Guillermo Fadanelli

vague tentation de lecture...


Guillermo Fadanelli est né à Mexico en 1963. Romancier, nouvelliste et essayiste.
Il a obtenu trois bourses du Fonds national pour la culture et les arts.
D’abord pour l’écriture de nouvelles, en 1995 ;
ensuite pour le soutien à l’édition de revues indépendantes en 1996 ;
et enfin, en 1997, pour l’aide aux projets et co-investissements.
Il a également obtenu le Prix national du roman Colima 2002 pour Lodo.
Parmi ses œuvres :
mentionnons le recueil d’aphorismes Dios siempre se equivoca (2004),
les livres de nouvelles : Terlenka (doce relatos para después del apocalipsis) (1995),
Barracuda (1997)
et Más alemán que Hitler (2001) ;
l’essai : La vía digital (2007),
et les romans :
La otra cara de Rock Hudson (1997),
Para ella todo suena a Frank Purcel (1998)
et Malacara (2007).
Un scorpion en février

Pour l'écrivain mexicain Guillermo Fadanelli, la nouvelle doit être un dessin aux traits forts et risqués, conséquence d'un regard patient.
Les personnages de Un scorpion en février sont définis par leurs actes qui sont autant la conséquence de leurs peurs que celle de leurs certitudes.
Le désir qui anime l'écriture de Fadanelli, l'un des jeunes écrivains mexicains les plus intéressants de sa génération, n'est pas tant celui de construire des histoires fictives que de donner vie à des récits capables de mettre en lumière quelques visages étranges de la nature humaine.
Ses personnages se montrent d'une manière franche, sans rhétorique ni ambiguïtés, et toujours décrits avec un humour létal et une réelle sympathie.

Eduquer les taupes

Dans les années 1970, contre l'avis du reste de la famille, un père décide d'envoyer son fils à l'Académie militaire de Mexico.
Une véritable odyssée commence pour l'enfant qui ne comprendra jamais la cause du châtiment paternel dont il a été l'objet.
Brutalement arraché à l'insouciance et à ses camarades, il se trouve plongé dans cet enfer terrestre où terreur et humiliation étaient le lot quotidien.
A onze ans, il découvre que le monde est à l'image de sa nouvelle école : un pénitencier peuplé d'ambitions et de cruautés inutiles.
En grande partie autobiographique, Éduquer les taupes est un roman malicieux, témoignage de ces années d'initiation où, pour survivre, le héros n'avait pour toute compagnie que son imagination et ses peurs.


L'AUTRE VISAGE DE ROCK HUSDON

«J'avais quinze ans lorsque j'ai connu Juan, le Johnny Ramfrez. J'étais assis au bord du trottoir, en train d'observer distraitement le flot régulier des voitures, quand il est sorti de l'hôtel et est resté à me regarder comme s'il me connaissait depuis toujours et n'attendait qu'un signe pour se décider à venir vers moi.
Il s'est immobilisé quelques secondes au pied des deux brèves marches de ciment qui précédaient la porte à serrures dorées, le temps de fouiller dans la poche de sa veste, d'en extraire un paquet blanc presque vide, d'allumer une cigarette et de se rendre compte qu'un homme à la peau mate, au visage dur et aux mouvements de guetteur s'approchait de lui, un revolver au poing.
L'homme est passé près de moi en répandant dans l'air un parfum de sueur rance et de lavande ; il avançait à pas très courts, comme s'il voulait retarder le plus possible le moment où il devrait atteindre l'endroit où Ramlrez l'attendait sans modifier en rien la mine sévère et dédaigneuse avec laquelle il avait l'habitude de considérer les gens.
Cet après-midi-là, moi, j'attendais ma soeur, qui avait continué jusqu'à la pharmacie du docteur Santoyo pour acheter des Tampax. Je n'avais pas voulu l'accompagner parce que ça m'énervait de voir Santoyo, un adulte à la peau fripée et au crâne rouge, lui faire des politesses entre grimaces obscènes et oeillades idiotes.
«Qu'est-ce que tu veux, fillette, où tu as mal aujourd'hui ?» L'enfant de salaud, il faisait toujours la même chose, exprès, juste pour s'exciter, planqué là, derrière ces grilles blanches dont il avait entièrement couvert le local pour être à l'abri des attaques, à regarder ma soeur comme s'il allait la manger, à lui demander si les Tampax étaient pour elle ou pour sa mère, à débiter des conneries jusqu'à ce que, à bout de nerfs, explosant de fureur et de rage, je m'approche du comptoir et lui dise : «Et vous, qu'est-ce que ça peut vous foutre ? C'est vous qui allez la soigner ou quoi ?»...»

Aucun commentaire: