Voilà, commencé et terminé le dernier Modiano... séduite comme toujours par son style simple et limpide... comment ne pas l'aimer !
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Mais voilà, juste un petit problème, je n'ai pas compris l'histoire... recherche du temps perdu ? nostalgie ? Bien l'impression d'être entrée dans un labyrinthe et de m'y être perdue...
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J'ai donc dû passé à côté de quelque chose et cela me gêne... donc, relecture prévue fin août... pour ne pas rester sur une impression de flou...
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illustration : suprlipopette
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«Depuis quelque temps, Bosmans pensait à certains épisodes de sa jeunesse, des épisodes sans suite, coupés net, des visages sans noms, des rencontres fugitives. Tout cela appartenait à un passé lointain, mais comme ces courtes séquences n’étaient pas liées au reste de sa vie, elles demeuraient en suspens, dans un présent éternel.»
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Dès ces premières lignes placées sous l’égide de la fuite du temps, le nouveau roman de Patrick Modiano manifeste son appartenance à une oeuvre sérielle, reprenant à la manière d’une ritournelle les mêmes thèmes, interrogations, types de personnages - avec un charme toujours renouvelé.
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Écrivain remontant le cours de souvenirs épars, à la recherche d’une femme disparue dont il ne sait presque rien, Jean Bosmans mène une enquête flottante, au gré d’une mémoire à éclipses.
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Il ne bénéficie pas de l’expérience professionnelle d’un détective privé, comme Guy Roland dans Rue des Boutiques Obscures ou Pierre Caisley dans Dans le café de la jeunesse perdue ;
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il n’a pas non plus le désir de pister documents et archives (même vides) qui fait tendre Dora Bruder vers la micro histoire. Il n’en ressemble pas moins à tous ces hommes modestes et incertains, en marge du monde et de la vie, qui peuplent les livres de Modiano et nous déroulent sur un ton dépouillé, troué de non-dits, des aventures aux contours si tremblés qu’elles semblent issues d’un songe.
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Celle que Bosmans s’efforce de faire ressurgir du néant, Margaret Le Coz, convoque elle aussi dans son sillage toutes les figures féminines qui l’ont précédée au sein de la toile tissée par l’auteur d’Accident nocturne depuis son premier texte, chacun de ses romans renvoyant aux autres et réciproquement.
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Denise engloutie dans les neiges de l’amnésie de Rue des Boutiques Obscures, Yvonne qui manque au rendez-vous dans Villa triste, Ingrid suicidée dans Voyage de noces, tout comme Louki à la fin de Dans le café de la jeunesse perdue.
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Toutes ces femmes évanouies s’inscrivent en filigrane de Margaret, qui prit un train pour ne jamais revenir, laissant sans nouvelles l’homme qui songe à elle quatre décennies après les faits, tandis qu’il tente de saisir dans un même mouvement celui et celle qu’ils furent, la quête de l’autre étant inséparable de la quête de soi chez Modiano.
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L’écrivain a souvent déclaré se retrouver davantage dans ses héroïnes que dans ses narrateurs.
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Ce sentiment d’empathie transparaît ici symboliquement à travers le lien noué entre ses deux personnages après un rapprochement né d’un hasard, leur intimité pareille à celle que ressentent des voyageurs dans un train de nuit, leur reconnaissance moins amoureuse que fraternelle, le temps de quelques cafés, promenades, mots échangés dans le Paris des années 1960, vingt ans après une guerre dont l’ombre continue de planer, insensiblement.
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Française née à Berlin, Margaret est poursuivie par un homme aux motifs obscurs, dénommé Boyaval, qui lui a fait quitter Annecy pour la Suisse, puis la Suisse pour Paris, où elle erre d’un petit emploi à un autre en se cachant.
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Travaillant vaguement aux «éditions du Sablier», Bosmans tâche d’éviter le couple improbable et agressif formé par sa mère et son compagnon aux allures de prêtre défroqué, qui lui réclament de l’argent chaque fois qu’ils le croisent.
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Ce que Margaret et Bosmans ont en commun, c’est la solitude, le déracinement, l’absence d’ancrage: «Ils n’avaient décidément ni l’un ni l’autre aucune assise dans la vie. Aucune famille. Aucun recours. Des gens de rien.»
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De là vient leur angoisse jumelle, leur sourde inquiétude, leur hésitation à vivre qui pousse le récit vers l’épure, avec son intrigue ténue, ses scènes fragmentées, ses phrases mates qui veulent restituer le fantôme d’une présence, esquisser plutôt que peindre, ne se raccrochant guère qu’à quelques adresses et numéros de téléphone pour exister.
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Une dimension topographique habituelle chez Modiano, où la carte des lieux qu’arpentent ses héros porte en elle l’empreinte d’une autre carte, celle d’une identité égarée: «Il suffisait d’entrer, de suivre le couloir jusqu’au bureau de la réception et de demander le numéro de la chambre de Margaret. Il devait bien rester des ondes, un écho de son passage dans cet hôtel et dans les rues avoisinantes.»
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Au paysage urbain et existentiel se superpose le paysage littéraire, avec cette invitation permanente à (re)parcourir les autres textes de Modiano.
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L’Horizon ouvre cependant une perspective nouvelle, visible dès son titre qui, contrairement aux précédents (Du plus loin que l’oubli, Fleurs de ruine...), suggère la projection plutôt que le repli sur le passé.
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Dans ce livre, l’écriture n’est plus seulement le vecteur des choses enfuies et enfouies. Lorsque Bosmans corrige les pages dactylographiées de son premier roman, il lui semble «atteindre un carrefour de sa vie, ou plutôt une lisière d’où il pourrait s’élancer vers l’avenir. Pour la première fois, il avait dans la tête le mot : avenir, et un autre mot : l’horizon. Ces soirs-là, les rues désertes et silencieuses du quartier étaient des lignes de fuite, qui débouchaient toutes sur l’avenir et l’HORIZON».
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Pour la première fois, rien n’a changé et tout a changé dans ce nouveau livre de Modiano, qui se veut plus qu’un mémorial autour d’un centre absent. Si les creux sont comme toujours plus nombreux que les pleins, si le silence de Margaret et son mystère font écho au «pauvre secret» que Dora Bruder emporta dans sa tombe, les voies du roman semblent ici offrir une issue, au lieu de l’impasse à laquelle elles ont toujours abouti jusque-là. «C’étaient toujours les mêmes mots, les mêmes livres, les mêmes stations de métro», observe Bosmans/Modiano.
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Et pourtant. Jamais l’auteur n’a été si près de briser le cercle de l’«éternel retour» qui fascinait l’un des héros de Dans le café de la jeunesse perdue, de quitter l’ombre pour rejoindre la lumière, le réel, le présent et retrouver - peut-être - ce qui a été perdu. - http://www.magazine-litteraire.com/content/critiques/article.html?id=15587
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http://www.maglm.fr/post/2010/04/05/L-horizon.-Patrick-Modiano Mais reste toujours le mystère de l'écriture de Modiano, cette simplicité, ce style apparemment plat dont on se demande comment peuvent sortir autant de reliefs, autant de récifs auxquels le lecteur s'accroche fermement, se découvrant peut-être parfois dans l'atmosphère et le miroir des personnages de Patrick Modiano.
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http://hop.over-blog.com/article-patrick-modiano-l-horizon-48015831.html Et si "L’horizon" n’est pas le plus fluide ou le plus saisissant des livres de Modiano, avec des personnages peut-être moins forts que dans ses précédents romans, il n’en reste pas moins un livre élégant, à l’écriture très douce, qui s’inscrit parfaitement bien dans son oeuvre.
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http://librairiegraffiti.wordpress.com/2010/05/17/lhorizon-de-patrick-modiano/ Variations sur le temps qui passe, la jeunesse et les occasions perdues, ou encore sur la difficulté des êtres à se rencontrer, les romans de Modiano possèdent un charme fou, auquel celui-ci n’échappe pas.
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http://sebastienfritsch.canalblog.com/archives/2010/04/30/17522852.html J'avais eu l'impression, lors de mon premier passage, d'avoir raté quelques détails du parcours. Alors je suis reparti, ... bien mon impression aussi... finalement assez rassurant de n'être pas la seule...
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Dès ces premières lignes placées sous l’égide de la fuite du temps, le nouveau roman de Patrick Modiano manifeste son appartenance à une oeuvre sérielle, reprenant à la manière d’une ritournelle les mêmes thèmes, interrogations, types de personnages - avec un charme toujours renouvelé.
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Écrivain remontant le cours de souvenirs épars, à la recherche d’une femme disparue dont il ne sait presque rien, Jean Bosmans mène une enquête flottante, au gré d’une mémoire à éclipses.
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Il ne bénéficie pas de l’expérience professionnelle d’un détective privé, comme Guy Roland dans Rue des Boutiques Obscures ou Pierre Caisley dans Dans le café de la jeunesse perdue ;
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il n’a pas non plus le désir de pister documents et archives (même vides) qui fait tendre Dora Bruder vers la micro histoire. Il n’en ressemble pas moins à tous ces hommes modestes et incertains, en marge du monde et de la vie, qui peuplent les livres de Modiano et nous déroulent sur un ton dépouillé, troué de non-dits, des aventures aux contours si tremblés qu’elles semblent issues d’un songe.
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Celle que Bosmans s’efforce de faire ressurgir du néant, Margaret Le Coz, convoque elle aussi dans son sillage toutes les figures féminines qui l’ont précédée au sein de la toile tissée par l’auteur d’Accident nocturne depuis son premier texte, chacun de ses romans renvoyant aux autres et réciproquement.
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Denise engloutie dans les neiges de l’amnésie de Rue des Boutiques Obscures, Yvonne qui manque au rendez-vous dans Villa triste, Ingrid suicidée dans Voyage de noces, tout comme Louki à la fin de Dans le café de la jeunesse perdue.
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Toutes ces femmes évanouies s’inscrivent en filigrane de Margaret, qui prit un train pour ne jamais revenir, laissant sans nouvelles l’homme qui songe à elle quatre décennies après les faits, tandis qu’il tente de saisir dans un même mouvement celui et celle qu’ils furent, la quête de l’autre étant inséparable de la quête de soi chez Modiano.
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L’écrivain a souvent déclaré se retrouver davantage dans ses héroïnes que dans ses narrateurs.
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Ce sentiment d’empathie transparaît ici symboliquement à travers le lien noué entre ses deux personnages après un rapprochement né d’un hasard, leur intimité pareille à celle que ressentent des voyageurs dans un train de nuit, leur reconnaissance moins amoureuse que fraternelle, le temps de quelques cafés, promenades, mots échangés dans le Paris des années 1960, vingt ans après une guerre dont l’ombre continue de planer, insensiblement.
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Française née à Berlin, Margaret est poursuivie par un homme aux motifs obscurs, dénommé Boyaval, qui lui a fait quitter Annecy pour la Suisse, puis la Suisse pour Paris, où elle erre d’un petit emploi à un autre en se cachant.
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Travaillant vaguement aux «éditions du Sablier», Bosmans tâche d’éviter le couple improbable et agressif formé par sa mère et son compagnon aux allures de prêtre défroqué, qui lui réclament de l’argent chaque fois qu’ils le croisent.
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Ce que Margaret et Bosmans ont en commun, c’est la solitude, le déracinement, l’absence d’ancrage: «Ils n’avaient décidément ni l’un ni l’autre aucune assise dans la vie. Aucune famille. Aucun recours. Des gens de rien.»
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De là vient leur angoisse jumelle, leur sourde inquiétude, leur hésitation à vivre qui pousse le récit vers l’épure, avec son intrigue ténue, ses scènes fragmentées, ses phrases mates qui veulent restituer le fantôme d’une présence, esquisser plutôt que peindre, ne se raccrochant guère qu’à quelques adresses et numéros de téléphone pour exister.
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Une dimension topographique habituelle chez Modiano, où la carte des lieux qu’arpentent ses héros porte en elle l’empreinte d’une autre carte, celle d’une identité égarée: «Il suffisait d’entrer, de suivre le couloir jusqu’au bureau de la réception et de demander le numéro de la chambre de Margaret. Il devait bien rester des ondes, un écho de son passage dans cet hôtel et dans les rues avoisinantes.»
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Au paysage urbain et existentiel se superpose le paysage littéraire, avec cette invitation permanente à (re)parcourir les autres textes de Modiano.
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L’Horizon ouvre cependant une perspective nouvelle, visible dès son titre qui, contrairement aux précédents (Du plus loin que l’oubli, Fleurs de ruine...), suggère la projection plutôt que le repli sur le passé.
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Dans ce livre, l’écriture n’est plus seulement le vecteur des choses enfuies et enfouies. Lorsque Bosmans corrige les pages dactylographiées de son premier roman, il lui semble «atteindre un carrefour de sa vie, ou plutôt une lisière d’où il pourrait s’élancer vers l’avenir. Pour la première fois, il avait dans la tête le mot : avenir, et un autre mot : l’horizon. Ces soirs-là, les rues désertes et silencieuses du quartier étaient des lignes de fuite, qui débouchaient toutes sur l’avenir et l’HORIZON».
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Pour la première fois, rien n’a changé et tout a changé dans ce nouveau livre de Modiano, qui se veut plus qu’un mémorial autour d’un centre absent. Si les creux sont comme toujours plus nombreux que les pleins, si le silence de Margaret et son mystère font écho au «pauvre secret» que Dora Bruder emporta dans sa tombe, les voies du roman semblent ici offrir une issue, au lieu de l’impasse à laquelle elles ont toujours abouti jusque-là. «C’étaient toujours les mêmes mots, les mêmes livres, les mêmes stations de métro», observe Bosmans/Modiano.
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Et pourtant. Jamais l’auteur n’a été si près de briser le cercle de l’«éternel retour» qui fascinait l’un des héros de Dans le café de la jeunesse perdue, de quitter l’ombre pour rejoindre la lumière, le réel, le présent et retrouver - peut-être - ce qui a été perdu. - http://www.magazine-litteraire.com/content/critiques/article.html?id=15587
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http://www.maglm.fr/post/2010/04/05/L-horizon.-Patrick-Modiano Mais reste toujours le mystère de l'écriture de Modiano, cette simplicité, ce style apparemment plat dont on se demande comment peuvent sortir autant de reliefs, autant de récifs auxquels le lecteur s'accroche fermement, se découvrant peut-être parfois dans l'atmosphère et le miroir des personnages de Patrick Modiano.
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http://hop.over-blog.com/article-patrick-modiano-l-horizon-48015831.html Et si "L’horizon" n’est pas le plus fluide ou le plus saisissant des livres de Modiano, avec des personnages peut-être moins forts que dans ses précédents romans, il n’en reste pas moins un livre élégant, à l’écriture très douce, qui s’inscrit parfaitement bien dans son oeuvre.
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http://librairiegraffiti.wordpress.com/2010/05/17/lhorizon-de-patrick-modiano/ Variations sur le temps qui passe, la jeunesse et les occasions perdues, ou encore sur la difficulté des êtres à se rencontrer, les romans de Modiano possèdent un charme fou, auquel celui-ci n’échappe pas.
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http://sebastienfritsch.canalblog.com/archives/2010/04/30/17522852.html J'avais eu l'impression, lors de mon premier passage, d'avoir raté quelques détails du parcours. Alors je suis reparti, ... bien mon impression aussi... finalement assez rassurant de n'être pas la seule...
2 commentaires:
j'adore cet auteur que j'avais découvert par hasard il y a plusieurs années après avoir épuisé mon stock de Pouy et avoir attaqué mon stock de Raynal ^^
oui j'aime aussi, mais là, j'ai dû le lire dans de mauvaises conditions... vraiment l'impression de m'être perdue entre deux époques... bien pourquoi, je pense le relire d'ici un mois...
j'ai aussi Pouy... quelques uns en attente après la brocante de printemps... Pour Raynal, un doute... me souviens plus si déjà lu...
bonne journée Mo,
bises
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