Ce qui peut être énervant, c’est cette petite morale cachée derrière les dialogues, les personnages forcément toujours philosophes, et la trop grande facilité dans l’enchaînement des péripéties.
Abordant deux sujets difficiles (la guerre et l’immigration clandestine) par le biais de la fable, Eric-Emmanuel Schmitt parvient à mettre son lecteur dans la peau d’un Ulysse contemporain.
Plus victime que héros rusé, le personnage de Saad permet de comprendre de l’intérieur les affres de la guerre, et la dignité nécessaire des clandestins.
L’auteur profite des interstices entre les étapes du voyage et les moments de magie pour introduire certaines de ses réflexions sur ses contemporains en temps de guerre, et sur nous autres Occidentaux, face à la misère des autres.
citation p. 292-293 :
“C’est là que commence la barbarie, Saad : quand on ne se reconnait plus dans l’autre, quand on désigne des sous-hommes, quand on classe l’humain de façon hierarchique et qu’on exclut certains de l’humanité.
Moi j’ai toujours choisi la civilisation contre la barbarie.
Et tant qu’il y aura des ‘gens qui ont droit à’ et des ‘gens qui n’ont pas droit à’, il y aura de la barbarie”
Toutes les aventures de Saad Saad sont ponctuées d’entretiens avec le fantôme de son père, décédé en Irak à cause d’une méprise de la part des Américains.
Son père, libraire, qui, sous le régime de Saddam Hussein, résistait en accumulant les livres interdits sous le régime, créant une véritable bibliothèque secrète, en mettant au parfum son fils, lui transmettant le goût de la digression.
Il apparaît donc à notre héros, pour lui raconter ses grandes théories et lui prodiguer des conseils, dans des dialogues inoubliables. Ainsi, selon lui, si le Moyen-Orient a des problèmes de démocratisation, c’est forcément à cause des palmiers.
Les aventures et mésaventures de Saad sont largement édulcorées par rapport à la réalité d'un clandestin, mais les divers aspects sont toutefois bien évoqués.
illustration : la liseuse de Joan Gillepsie
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