En passant par "le monde"...
décidemment Mme de Lafayette est à la mode cette année...
Un bonheur de lecture est rarement isolé. Pour tous ceux qui ont eu la chance de redécouvrir récemment
La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette (1634-1693), classique stigmatisé par le président de la République, Nicolas Sarkozy, comme le symbole d'une littérature désuète et inutile, Martine Reid, professeur de littérature française à Lille, qui dirige depuis trois ans la collection "Femmes de lettres" en "Folio 2 €", a eu l'excellente idée d'exhumer trois courtes nouvelles du même auteur : l'"Histoire de la princesse de Montpensier", l'"Histoire de la comtesse de Tende" et enfin l'"Histoire d'Alphonse et de Bélasire".
Cette collection, qui publie cinq nouveaux titres par an, en mars, pour la Journée des femmes, vise à faire connaître au public des textes oubliés (romans, nouvelles, essais ou Mémoires) écrits par des femmes, de Mme de Lafayette à Simone de Beauvoir ou Isabelle Eberhardt, en passant par George Sand.
Avec les récits secs et nerveux de Mme de Lafayette, il faut commencer par ôter titres et particules, qui figent l'imagination, pour que les textes retrouvent tout leur éclat. Ils redeviennent alors des petits bijoux littéraires qui annoncent les nouvelles de Barbey d'Aurevilly au XIXe siècle, mais aussi bon nombre de romans contemporains.
AMOURS CONTRARIÉES
Passions extrêmes, amours contrariées, jalousie, toute la palette des sentiments humains est ici exposée et disséquée.
Trop humaines, les femmes s'effondrent, tandis que, défiants, les hommes préfèrent se murer dans leurs contradictions.
Car la gaieté n'est guère de mise sous la plume de la mère de tous les romanciers modernes. Les moments de joie amoureuse sont arrachés de manière très fugace, et conduisent tout droit à la catastrophe. Le trait général à ces nouvelles reste que "dans tous les cas le malheur est au bout", résume Martine Reid. C'est peut-être cette logique qui rebute tant le chef de l'Etat... Chez Mme de Lafayette, marquées du sceau de la fatalité, les amours finissent toujours mal.
Ainsi de l'histoire du comte de Tende, un mari trompé qui découvre son malheur en même temps qu'il perd son épouse. Madame de Lafayette conclut, laconique : "Il reçut cette nouvelle sans inhumanité, et même avec quelques sentiments de pitié, mais néanmoins avec joie.
Quoi qu'il fût fort jeune, il ne voulut jamais se remarier, les femmes lui faisaient horreur, et il a vécu jusqu'à un âge fort avancé". Quelques lignes qui sont à la fois le point final et le point culminant de la nouvelle. p
*
HISTOIRE DE LA PRINCESSE DE MONTPENSIER ET AUTRES NOUVELLES
de Madame de Lafayette
"Folio", "Femmes de lettres", 144 p., 2 €.
Alain Beuve-Méry
Un bonheur de lecture est rarement isolé. Pour tous ceux qui ont eu la chance de redécouvrir récemment
La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette (1634-1693), classique stigmatisé par le président de la République, Nicolas Sarkozy, comme le symbole d'une littérature désuète et inutile, Martine Reid, professeur de littérature française à Lille, qui dirige depuis trois ans la collection "Femmes de lettres" en "Folio 2 €", a eu l'excellente idée d'exhumer trois courtes nouvelles du même auteur : l'"Histoire de la princesse de Montpensier", l'"Histoire de la comtesse de Tende" et enfin l'"Histoire d'Alphonse et de Bélasire".
Cette collection, qui publie cinq nouveaux titres par an, en mars, pour la Journée des femmes, vise à faire connaître au public des textes oubliés (romans, nouvelles, essais ou Mémoires) écrits par des femmes, de Mme de Lafayette à Simone de Beauvoir ou Isabelle Eberhardt, en passant par George Sand.
Avec les récits secs et nerveux de Mme de Lafayette, il faut commencer par ôter titres et particules, qui figent l'imagination, pour que les textes retrouvent tout leur éclat. Ils redeviennent alors des petits bijoux littéraires qui annoncent les nouvelles de Barbey d'Aurevilly au XIXe siècle, mais aussi bon nombre de romans contemporains.
AMOURS CONTRARIÉES
Passions extrêmes, amours contrariées, jalousie, toute la palette des sentiments humains est ici exposée et disséquée.
Trop humaines, les femmes s'effondrent, tandis que, défiants, les hommes préfèrent se murer dans leurs contradictions.
Car la gaieté n'est guère de mise sous la plume de la mère de tous les romanciers modernes. Les moments de joie amoureuse sont arrachés de manière très fugace, et conduisent tout droit à la catastrophe. Le trait général à ces nouvelles reste que "dans tous les cas le malheur est au bout", résume Martine Reid. C'est peut-être cette logique qui rebute tant le chef de l'Etat... Chez Mme de Lafayette, marquées du sceau de la fatalité, les amours finissent toujours mal.
Ainsi de l'histoire du comte de Tende, un mari trompé qui découvre son malheur en même temps qu'il perd son épouse. Madame de Lafayette conclut, laconique : "Il reçut cette nouvelle sans inhumanité, et même avec quelques sentiments de pitié, mais néanmoins avec joie.
Quoi qu'il fût fort jeune, il ne voulut jamais se remarier, les femmes lui faisaient horreur, et il a vécu jusqu'à un âge fort avancé". Quelques lignes qui sont à la fois le point final et le point culminant de la nouvelle. p
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HISTOIRE DE LA PRINCESSE DE MONTPENSIER ET AUTRES NOUVELLES
de Madame de Lafayette
"Folio", "Femmes de lettres", 144 p., 2 €.
Alain Beuve-Méry
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