samedi 31 janvier 2009

Géraldine Brooks - le livre d'Hanna

livre de chevet en cours...
les aventures de livres, manuscrits et autres parchemins m'inspirent toujours... pour celui-ci j'avoue avoir eu quelques difficultés "à entrer" dans l'histoire. Mais passé le premier chapitre... une seule envie, continuer à vivre les tribulations de cette Haggadah.
Noter qu'un autre livre est édité en france : 1666, et qui me semble devoir être tout aussi passionnant !

En Europe, en Australie et à Jérusalem, de 1480 à 2002. 1996, Sarajevo.
Hanna Heath, une Australienne d'une trentaine d'années, conservatrice passionnée de manuscrits anciens, se voit confier le livre que tout chercheur rêverait de tenir entre ses mains : une célèbre Haggadah, vieille de plusieurs siècles, retrouvée il y a peu dans les ruines de la ville.
Dépêchée de l'autre bout du monde pour cette mission, Hanna compte bien percer les secrets de ce livre hébreu, de ses sublimes enluminures et de ces hommes et femmes de toutes religions qui l'ont fabriqué, manié et sauvé à travers les âges.
Elle s'intéresse ainsi à la personnalité d'Ozren Kamaran, le bibliothécaire musulman du Musée national, qui a caché la Haggadah pendant le siège de Sarajevo. Marqué par les tragédies du passé, cet homme ténébreux va éveiller des sentiments nouveaux en Hanna…
Mais, riche de ses découvertes sur l'artefact, la jeune femme part mener l'enquête, prête à tout pour découvrir l'incroyable destin de ce livre sacré, témoin éclatant des drames de l'Histoire auquel lui et son peuple ont survécu.
De Sarajevo pris dans la tourmente nazie à la montée de l'antisémitisme dans les années 1890 à Vienne, des dernières heures de l'Inquisition vénitienne à l'expulsion des Juifs de l'Espagne d'Isabelle la Catholique, Hanna parvient à lever un bout du voile sur ces actes de courage ou de lâcheté qui ont fait l'histoire du manuscrit.
Depuis ce bibliothécaire musulman qui va sauver la Haggadah sous le nez des Allemands, à ce censeur papal et ce rabbin, rongés par des vices cachés, qui vont le faire échapper aux flammes condamnant les ouvrages hérétiques, jusqu'à cette esclave musulmane africaine, passionnée de peinture, dans l'Andalousie mauresque de la convivencia. En hommage à tous ceux-là et bien d'autres encore, Hanna se lance dans une quête de vérité, qui va la mener plus loin qu'elle ne l'aurait imaginé…
*
La Haggada de Pessah
(hébreu : הגדה של פסח) est un texte en hébreu ancien utilisé pour la cérémonie du Seder durant Pessa'h, la Pâque juive.
La Haggada est ancienne, elle date de l'époque de la Mishnah c'est-à-dire environ deux millénaires.

La Haggada raconte l'histoire des
Hébreux et leur exil d'Égypte.
Le contenu provient des événements narrés dans l'Ancien Testament, dans le livre l'Exode.
Elle est lue durant le Seder et contient les rites à réaliser durant la cérémonie.

La Haggada de
Bordeaux, parue en 1813, est la première et la seule qui soit manuscrite, enluminée et produite en France au XIXe siècle. Elle est accompagnée d'une traduction en ancien français. Elle fut écrite par Isaac Soreph et illustrée par son frère Jacob à l'occasion du mariage de leur neveu et fils, Isaac Soreph avec Léa Lévy Alvarès.
illustration : Haggada de Pessah manuscrite, XIVe siècle

biographie :
Correspondante de guerre pour le Wall Street Journal pendant quatorze ans, Geraldine Brooks a couvert des combats en Bosnie, en Somalie et au Moyen-Orient. Une incarcération dans les geôles nigériennes la pousse à abandonner le journalisme.
Elle se consacre alors à la rédaction de son premier roman, 1666 (Calmann-Lévy, 2003 ; 10/18, 2004). Lauréate du prix Pulitzer pour March en 2006, Geraldine Brooks est également l'auteur d'un essai intitulé Les Femmes dans l'Islam : Un monde caché (Belfond, 1995).
Le Livre d'Hanna est son troisième roman.
Née en Australie, où elle a grandi, Geraldine Brooks vit à présent à Vineyard, une petite île près du Cap Cod, avec son mari, leur fils et leurs trois chiens.

Autre titre :
1666

1666 : l'année de la grande peste en Europe. Punition de Dieu infligée aux hommes ou intervention du Malin ?
Les passions s'exacerbent, la peur se répand et la trame fragile du tissu social se délite. Eyam, un village perdu du centre de l'Angleterre, n'est pas épargné par l'épidémie et ses habitants décident de se mettre en quarantaine sous l'influence d'un pasteur au charme ambigu.
Très vite, Anna Frith, une jeune servante qui élève seule ses deux enfants, se distingue par son abnégation dans les soins qu'elle prodigue aux malades et le courage qu'elle affiche lorsque la superstition renaît et entraîne une chasse aux sorcières meurtrière. Dans ce huis clos suffocant où les hommes se révèlent diaboliques, cette jeune femme sans éducation fera triompher la générosité et la raison, au péril de sa vie.

Geraldine Brooks, passeuse d’Histoire
Texte : Véronique Cardi -édition Belfond
1. Vos deux précédents romans s’inscrivaient au cœur de la Grande Peste en Europe et de la guerre de Sécession. Le Livre d’Hanna est une fresque épique sur l’art et les persécutions religieuses. Qu’est-ce qui vous pousse à traiter de tel sujet ou telle époque historique ?

J’aime les histoires du passé que nous connaissons par pans, mais pas complètement, qui nous intriguent par les faits rapportés à leur sujet, mais dont les zones d’ombre laissent une place à l’imagination.

2. Selon vous, qu’est-ce que la Haggadah de Sarajevo a de particulier qui lui a permis de survivre à travers les siècles ?

C’est une question fascinante. Pourquoi ce petit livre a-t-il toujours trouvé des protecteurs alors que tant d’autres n’ont pas eu cette chance ? Il est frappant que ce manuscrit soit issu de l’Espagne de la convivencia – une ère où la diversité était tolérée, voire même célébrée, et qu’il ait trouvé sa place des siècles plus tard dans un endroit similaire, à Sarajevo. Ainsi, même lorsque des forces de haine se sont élevées dans nos sociétés et ont détruit l’esprit d’ouverture culturelle et religieuse, il y a toujours eu des individus pour voir ce qui allait arriver et faire tout ce qui était en leur pouvoir pour l’empêcher.

3. Étiez-vous déjà en train de travailler sur Le Livre d’Hanna lorsque March a remporté le prix Pulitzer ? En quoi gagner ce prix prestigieux a-t-il influencé votre écriture ?

Je travaillais sur Le Livre d’Hanna avant même de commencer à écrire March. J’avais du mal à traiter de la Seconde Guerre mondiale : c’est une période déjà tellement évoquée, je voulais trouver un pan de la guerre qui ne soit pas trop familier pour les lecteurs. Après de nombreuses recherches infructueuses, j’ai soudain eu l’idée de March et cette histoire m’a semblé tellement simple à écrire que j’en ai tout de suite entamé la rédaction.La surprise du Pulitzer n’a affecté mon écriture qu’en l’interrompant un certain temps à cause de l’attention nouvelle suscitée par March. Mais, après quelques semaines de distraction, j’étais de retour à ma table, seule dans mon bureau, à faire ce que j’ai toujours fait, c’est-à-dire essayer d’écrire le mieux possible, jour après jour.

4. La conservation de manuscrits n’est pas un travail très glamour, et pourtant le récit mettant en scène les recherches d’Hanna est aussi riche en suspense et captivant que les épisodes passés de l’odyssée de la Hagaddah. Qu’est-ce qui vous a inspiré cette histoire ?

J’aime écrire à la première personne, le plus important pour moi est donc de trouver la voix du livre. Ma première idée était de faire parler une conservatrice bosniaque, car j’aime la façon de s’exprimer des habitants de Sarajevo, avec une sorte d’esprit désabusé et mordant à la fois, qui souligne une capacité impressionnante à surmonter de grandes souffrances. Mais je n’arrivais pas à trouver la voix du livre, j’étais bloquée. Soudain je me suis dit : « Pourquoi ne serait-elle pas Australienne ? » Voilà une voix qui m’est familière. C’est ainsi que Hanna a pris vie dans mon esprit, et, avec elle, toute la partie contemporaine de l’histoire, qui ne devait être d’abord qu’un cadre pour les histoires passées, a pris une plus grande importance.

5. Les techniques scientifiques employées par Hanna pour examiner le livre sont vraiment fascinantes. Vous êtes-vous appuyée sur des recherches réelles pour ces passages ou avez-vous puisé dans votre imagination ?

’ai visité des laboratoires, où j’ai pu interviewer des scientifiques et des conservateurs, et observer leur travail. Mais mon livre est une œuvre de fiction, et non un traité technique. Les experts pourront donc repérer un ou deux endroits où j’ai pris quelques libertés.

6. Qui est votre personnage préféré et pourquoi ?

Ce serait comme demander à un parent quel est son enfant préféré. Hanna est bien sûr devenue une sorte de bonne camarade, et cela me manque de ne plus passer mes journées avec elle. Mais j’éprouve une certaine tendresse pour tous les personnages du livre, et peut-être davantage pour les plus fragiles.

7. Le Livre d’Hanna s’inscrit dans beaucoup d’époques différentes. Les recherches et l’écriture de ce roman ont-elles été plus laborieuses que pour les précédents ?

J’ai dû faire plus de recherches, mais cela n’a pas été difficile. J’ai aimé tous les voyages – physiques et intellectuels – qu’elles m’ont fait faire. Voir briller les dômes et les flèches des églises de Venise dans la lueur du petit matin ; avoir le privilège de rencontrer Servet Korkut, qui a soutenu son mari dans sa résistance au fascisme ; voir Andra Pataki manier avec soin la vraie Haggadah de Sarajevo, ce sont des expériences uniques dans une vie.

8. Le Livre d’Hanna va-t-il être publié en Bosnie, et si oui, à quel genre d’accueil vous attendez-vous ?

J’espère qu’il le sera, mais je n’ai aucune idée de l’accueil qu’il y recevra. Ce que je fais est très présomptueux : me mêler de l’histoire d’autres gens. Quand je suis retournée à Eyam, le village ravagé par la peste dans mon roman 1666, je m’attendais à être clouée au pilori (ils en ont toujours là-bas).À mon grand soulagement, les gens avaient adopté le livre. J’ai eu les mêmes craintes en allant faire une lecture de March à Concorde, dans le Massachusetts. Et j’étais finalement ravie de voir Louisa May Alcott (Jan Turquist, le directeur de l’Orchard House Museum, s’était déguisé pour l’occasion) me rejoindre à cette lecture, pour me remercier d’avoir été une des rares personnes à essayer de comprendre et d’apprécier son père. J’espère donc que les Bosniaques me pardonneront d’avoir pris des libertés avec leur histoire et verront mon livre comme un hommage rendu à l’esprit remarquable de Sarajevo qui m’a tant inspiré.

9. Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

je viens de commencer à explorer une histoire particulièrement intrigante, qui a eu lieu tout près de chez moi, à Martha’s Vineyard, en 1666, une de mes années de prédilection. Avec un juste équilibre entre connu et inconnu, cette histoire me semble être une base idéale pour construire un récit.

source - http://www.belfond.fr/site/belfond_etranger_l_focus_auteur_l_geraldine_brooks_&300&198.html

illustration : la liseuse de Dante Gabriele Rossetti

vendredi 30 janvier 2009

curiosité de lecture : miserere de Jean-Christophe Grangé

Tellement de thèmes abordés dans ce livre, que pour le moment je n'irais pas plus loin. Mais le syndrome de Peter Pan, l'histoire de Gilles de Rais feront probablement d'autres articles un peu plus tard.

Personnage de la mythologie grecque, Pan (en grec ancien Πάν / Pán, « tout ») est le dieu de la totalité, de la Nature toute entière.
Il est souvent identifié à Phanès ou Protogonos.
Au cœur de la tradition orphique, il en est le dieu unique.





Pan est le protecteur des bergers et des troupeaux (représentant symboliquement la Nature).
Il est généralement représenté avec des pieds de bouc et des cornes contrairement aux [[centaure] (hommes chevaux) avec lesquels il est souvent confondu: en effet eux sont représentés de manière plus humaine. Ils sont identifiables par leur barbe et leurs cheveux hirsutes, des oreilles pointues d'équidés, une longue queue chevaline et leur sexe est généralement en érection — attributs que le temps humanisera.

L’
Hymne homérique qui lui est consacré le nomme fils d'Hermès et d'une nymphe, fille de Dryops.
Il naît ainsi sur le mont Cyllène, en Arcadie. Devant son apparence monstrueuse, sa mère s'enfuit, mais le père porte son fils sur l'Olympe, où tous les dieux se réjouissent de le voir. Selon l'auteur, ce serait l'origine de son nom.
*
Selon d'autres légendes,
il passait pour le fils de Zeus et de Callisto ou de Zeus et de la nymphe Thymbris, ou encore de Zeus et d'Hybris, la déesse de la Démesure.
*
Enfin, suivant des récits postérieurs à l'Odyssée,
Pan est plutôt considéré comme le fils d'Hermès par Pénélope qu'Ulysse aurait répudiée en raison de son infidélité, ou bien comme celui qu'elle conçut après avoir cédé successivement à ses cent-huit prétendants.
Pour concilier ces différentes variantes, Nonnos de Panopolis imagina l'existence d'une quinzaine de Pan différents, les uns issus du Pan primordial, alors considéré comme le fils de la nymphe-chèvre Amalthée et le frère de lait de Zeus, les autres nés d'Hermès par les nymphes Sosé et Pénélope.
*
Selon
Ovide (Métamorphoses, XI),
Pan défie Apollon dans un concours musical jugé par Tmolos, roi lydien, finalement remporté par le dieu lui-même (le concours, avec notamment la présence de Midas, peut être rapproché de celui qui oppose Apollon et Marsyas).
*
Pan est présenté comme le dieu de la foule, et notamment de la
foule hystérique, en raison de la capacité qui lui était attribuée de faire perdre son humanité à l'individu paniqué, et de déchirer, démembrer, éparpiller son idole. C'est l'origine du mot « panique », manifestation humaine de la colère de Pan.
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Si l'on attribue à Pan des comportements peu bienveillants, il faut faire abstraction des attentions qu'il portait aux bergers et à leurs troupeaux dont il était naturellement le protecteur.
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Le
christianisme s'inspira sans doute de l'apparence de ce dieu très populaire, et le « diabolisa » pour lutter contre le paganisme et toute autre tradition religieuse qui résistait à son implantation.
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C'est pan qui fournit les chiens de la meute d'Artémis.
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Ses amours


La nymphe Syrinx se transforma en roseaux pour échapper à son désir. Comme le vent de son souffle faisait gémir les roseaux, en hommage, Pan confectionna un instrument de musique auquel il donna le nom de syrinx, connu sous celui de flûte de pan.
illustration : Pan et Syrinx, par Nicolas Poussin (1637)
La nymphe Écho dont la voix merveilleuse rendait tout homme amoureux. Pan la rattrapa et l'éparpilla sur toute la Terre. Il n'en reste que l'écho, pâle imitation et une fille, Lynx, qu'Héra, pour la punir d'avoir favorisé les amours de Zeus avec Io, métamorphosa en statue de pierre ou en un oiseau utilisé dans les conjurations amoureuses, le torcol.
illustration : Écho et Narcisse, Nicolas Poussin, v. 1629-1630, musée du Louvre



Le berger de Sicile
Daphnis, amant de Pan.
illustrations : Haut-relief de Pan, Palais Neuf (Rome)

Séléné (personnification de la Lune), qui se laissa séduire en acceptant un troupeau de bœufs blancs.

illustration : Séléné entourée des Dioscures ou de Phosphoros (l'étoile du matin) et Hespéros (l'étoile du soir), autel de marbre du IIe siècle trouvé en Italie, musée du Louvre

*
La
nymphe Euphéné, qui lui donne un fils, Crotos, devenu la constellation du sagittaire.
Ainsi, Syrinx pourchassée par envie s'échappa et fut rassemblée post mortem (et ainsi rattrapée), alors qu'Écho pourchassée par jalousie fut rattrapée puis éparpillée dans la mort (et ainsi disparut).

Le mythe de Pan concentre toute la dualité de l'imitation : désir/jalousie, rassembler/éparpiller, présence/absence.
sources : wikipédia et divers

curiosité de lecture : miserere de Jean-Christophe Grangé



Le ricercare ou ricercar est une ancienne forme musicale (période du haut baroque) basée sur le procédé de l'imitation. L'équivalent français est recherche utilisé par exemple par l'organiste Jehan Titelouze.
C'est une forme
contrapuntique moins élaborée que la fugue, laquelle est plus tardive et exploite un thème générateur de façon systématique alors que le ricercare enchaîne des épisodes différents qui peuvent être sans lien thématique.


De façon paradoxale, Bach utilise le mot ricercare pour désigner de savantes architectures contrapuntiques de son · « Offrande Musicale » dédiée au roi de Prusse mélomane Frédéric II, avec l'acrostiche :

Regis Iussu Cantio Et Relique Canonica Arte Resoluta

c’est-à-direLa musique faite par ordre du roi, et le reste résolu par l'art du canon.


l'Offrande musicale

Œuvre instrumentale de Johann Sebastian Bach, l'Offrande musicale (BWV 1079) (en allemand Musikalische Opfer) a été composée en 1747, durant la période où le musicien travaillait à Leipzig.

De nombreuses histoires relatent la naissance de cette œuvre. Les écrits réalisés sur cet ensemble de pièces musicales diffèrent en quelques points sur les circonstances de création, mais des idées communes ressurgissent fréquemment.

Le roi
Frédéric II de Prusse était un passionné de musique, quoique piètre instrumentiste. En effet, son père Frédéric-Guillaume Ier de Prusse, qui avait licencié dès son avènement les artistes de la Cour (partis ensuite faire le bonheur de Cours mineures, comme celle d'Anhalt-Köthen où devait officier le jeune Johann Sebastian Bach de 1717 a 1723) avait interdit qu'on lui donne une éducation humaniste, limitant son apprentissage de l'histoire et des langues et interdisant bien sûr celle des arts.

Le 7 mai 1747, il reçoit
Johann Sebastian Bach à sa Cour (il s'était fait accompagner par son fils Wilhelm Friedemann Bach) et lui fait essayer ses nombreux instruments à claviers (clavecins, et les nouveaux piano-forte).

Au cours de la soirée, le roi soumet à Johann Sebastian Bach un thème qu'il lui joue à la flûte et lui demande d'improviser et développer un discours musical à partir de ce thème.

La légende raconte que Johann Sebastian Bach improvise alors longuement des variations, et s'excuse de ne pouvoir plus élaborer sur ce sujet si difficile après avoir interprété le célèbre Ricercare à 6 voix. De retour chez lui, Bach se remet au travail en écrivant tout ce qu'il avait improvisé, tout en enrichissant le contenu qu'il fait parvenir au roi le 7 juillet sous le titre de l'Offrande musicale.

« Entre autres choses, [Frédéric II] me parle de la musique et d'un grand organiste nommé [Carl Phillip Emanuel] Bach, resté pendant un certain temps à Berlin. Cet artiste est doté d'immenses talents, supérieurs à ce que je n'ai jamais entendu ou imaginé, pour ce qui est de la profondeur de la connaissance de l'harmonie et de la puissance de l'interprétation. Néanmoins, ceux qui ont connu son père pensent que son fils ne l'égale pas ; le roi s'accorde avec ce jugement et pour le prouver, une personne chante pour moi [le thème d']une fugue chromatique qu'il avait donné au vieux Bach et sur laquelle devant lui il avait improvisé une fugue à 3, puis à 4 et enfin à 6 voix. »
Gottfried van Swieten

L'ensemble de ces pièces est très riche au niveau du
contrepoint ;
Bach développe ici des canons (de deux à huit voix), des ricercares, des fugues canoniques et une sonate en trio.
Certaines pièces sont écrites pour clavecin seul, et d'autres sur plusieurs portées (ensemble instrumental). Ainsi, le manuscrit du ricercare à 6 voix est écrit sur 6 portées, chacune ayant sa clef correspondante, mais la partition ne précise pas la nature de l'instrument qui doit exécuter la ligne mélodique (ce type d'écriture est également présent dans l'Art de la fugue, où les quatre voix ne sont pas précisées). Ceci traduit le fait que Bach concevait la musique autant comme un jeu d'écriture qu’un jeu instrumental.

sources : wikipédia et divers
illustrations :
2-J.S. Bach en 1748Portrait par Elias Gottlob Haussmann (1702-1766)Altes Rathaus à Leipzig

curiosité de lecture : miserere de Jean-Christophe Grangé

Je poursuis encore un peu sur les thèmes utilisés par Grangé pour son "Miserere"...

et donc, coup d'oeil sur le "cri primal"... à défaut de "cri qui tue"...

La thérapie primale est un un processus de psychothérapie et une ébauche de théorie développés en 1967 par Arthur Janov, un psychologue américain de formation freudienne.

Son fonctionnement et la théorie sur laquelle elle fonctionne sont explicités dans son livre Le cri primal (1970).

théorie
Dans une phrase volontairement simplificatrice Arthur Janov résume la thérapie primale comme un "traitement pour la guérison de la névrose".

En fait les patients qui témoignent dans le premier livre de Janov intitulé "Le cri primal" décrivent des histoires de vie, des symptômes et des résolutions qui correspondent à une large palette de la
nosographie psychiatrique - psychose, psychopathie du jeune adulte, état limite, etc.
Cette approche porte ce nom car
Arthur Janov, psychanalyste en 1970, demande un jour à un patient d'appeler sa "maman". Après avoir prononcé plusieurs fois le mot "maman", le patient pousse un "cri".

Ce cri correspond à l'état primal, prélangagier de son revécu. Dès lors, A.Janov s'efforce avec ses patients d'explorer ce moment, qui se situe entre l'enfance et la naissance (Janov définit la naissance comme étant la période allant de la naissance dite jusqu'au neuf premiers mois du nourrisson). Naissance dont l'importance avait déjà été soulignée par Otto Rank.
Il se rend alors compte que quelque chose se passe en-deça du niveau de la parole, et donc, du cortex. Il en vient à penser que ce "cri" vient des tréfonds de notre corps, de son "origine", et il nomme donc cette nouvelle thérapie, la "thérapie primale".
Janov ne comprendra pas tout de suite l'importance de la naissance au sein de cette nouvelle thérapie. Ce n'est qu'une dizaine d'année après son apparition que certains thérapeutes (et patients) vont "vraiment" s'y intéresser. Beaucoup des premiers patients ont soufferts du manque de cet élément dans leur thérapie, nécessaire au déroulement "primal".
Pour d'autres, elle sera tout de même libératrice.
John Lennon écrira Let it be après avoir fait cette thérapie.
3 niveaux
La thérapie primale est différente d'une simple psychothérapie verbale car elle actionne ce qu'appelle Janov les "trois niveaux" nécessaires à l'exploration des sentiments.
La troisième ligne, celle du présent, celle du cortex.
Cortex cérébral

La seconde ligne, celle des souvenirs, des émotions, celle du
système limbique.
La première ligne, celle de l'enfance, celle de la naissance, celle du
cerveau reptilien.
L'objectif du travail est donc de reconsidérer la "fabrique de soi" selon l'expression de
Gilles Deleuze en reprenant contact avec les matériaux premiers enfouis au fond du psychisme pour les remanier.
processus
Le processus de revécu des événements profondément enfouis est nommé régression;
A partir du présent, de la troisième ligne, il y a une descente vers la seconde, puis à la première ligne. Cette combinaison est nécessaire pour réaliser un "primal".
Janov explique qu'il n'est pas possible de guérir une personne en actionnant seulement le niveau du cortex vu que la plupart des traumatismes remontent bien au-delà de la parole et sont inscrits dans le corps et donc le
cerveau reptilien.

Le fait d'intellectualiser n'aidera aucunement à "démanteler" une
névrose, comme dans une psychanalyse conventionnelle. Cela servira juste à renforcer la névrose, à renforcer le refoulement, le système de défense.
sources : wikipédia et divers
*
illustrations :

-Maria Malibran jouant le rôle de Desdémone dans l'Otello de Rossini en 1834.Portrait par François Bouchot. Musée de la Vie Romantique.

-Le Cri (Skrik, 1893) est un célèbre tableau expressionniste de l'artiste norvégien Edvard Munch. Cette œuvre, symbolisant l'homme moderne emporté par une crise d'angoisse existentielle, est souvent considérée comme l'œuvre la plus importante de l'artiste. Le paysage au fond est Oslo, vu depuis la colline d'Ekeberg.

jeudi 29 janvier 2009

Mo Hayder - Pig Island

livre de chevet terminé hier soir... que dire d'autre sinon nul ! Vraiment très loin du très bon "Tokyo". Difficile de croire que ces 2 livres ont été écrits par le même auteur.
Il me reste "L'Homme du soir" en attente de lecture. Une histoire de troll...
Vu ma déception, je pense qu'il va falloir qu'il se passe quelques temps avant que j'ai envie de nouveau de lire un livre de Mo Hayder.

Joe Oakes est journaliste et gagne sa vie en démystifiant les prétendus phénomènes paranormaux.
En débarquant sur Pig Island, îlot perdu au large de l'Ecosse, il est fermement décidé à vérifier si la trentaine d'allumés qui y vivent en vase clos vénèrent le diable comme les en accusent les gens de la côte.
Et, surtout, il veut tordre le cou au mythe du monstre qui aurait élu domicile sur l'île, une mystérieuse créature filmée deux ans plus tôt par un touriste à moitié ivre. Mais rien, strictement rien ne se passe comme prévu.
Joe est confronté à des événements si atroces qu'ils bouleversent à jamais son idée de la peur et du mal...
illlustration : la liseuse de Surawane Karakawa

mercredi 28 janvier 2009

Mort de l'écrivain John Updike à 76 ans

L'auteur de la tétralogie des "Rabbit" et deux fois lauréat du prix Pullitzer a succombé à un cancer du poumon.
L'écrivain américain John Updike est décédé mardi 27 janvier à l'âge de 76 ans, a annoncé son éditeur. L'auteur de la tétralogie des "Rabbit" et deux fois lauréat du prix Pullitzer a succombé à un cancer du poumon, a précisé Alfred Knopf dans un communiqué.
John Updike vivait à Beverly Farms, dans le Massachusetts, dans l'est des Etats-Unis. Né en 1932, il avait commencé une carrière prolifique et largement couronnée de succès dans les années 1950, enchaînant romans, nouvelles, poèmes, critiques littéraires, mémoires et même un essai sur un joueur de base-ball.
L'Amérique des petites villes dans l'après-Deuxième Guerre mondiale était l'un de ses thèmes favoris.
John Updike a publié plus de 50 ouvrages et remporté pratiquement tous les prix littéraires américains les plus prestigieux, dont deux Pulitzer et deux National Book Awards.
(Avec AP) NOUVELOBS.COM 28.01.2009 08:51

mardi 27 janvier 2009

Salon du livre de Paris 2010 : La Turquie n'est plus invitée



Une tête de Turc ?

La nouvelle a mis du temps à se répandre, mais elle était pourtant bien véritable : le salon du livre de Paris qui pour son édition de 2010 devait accueillir la Turquie en invité d'honneur, fera... une pause dans ses invitations.
Le pays qui avait été invité l'an passé pour la Foire du livre de Francfort avait eu l'occasion, notamment pour un écrivain comme Orhan Pamuk, de cingler le gouvernement en place.
« Le penchant de l'État turc pour l'interdiction de livre et la sanction des auteurs continue malheureusement. Mais personne ne devrait envisager que les auteurs et les éditeurs se décourageant », avait-il expliqué.
Pour l'heure, le Syndicat national de l'édition (SNE) est injoignable et seuls nos confrères de l'Express disposent d'éléments qui attestent de ce désistement. Les mouvements autour d'Israël en 2008 sont-ils à imputer à cette décision ?
Manifestement non, mais le 30e anniversaire de la manifestation primera sur l'invitation d'un pays membre, affirme-t-on.
Une décision qui peut sembler malvenue, étant donné qu'Istanbul sera la capitale européenne de la Culture en 2010.
En outre, l'année 2009 devrait être celle de la Saison de la Turquie en France, une manifestation destinée à rappeler les liens d'amitié qui unissent les deux pays, tout en faisant découvrir la richesse de la Turquie d'aujourd'hui.
L'occasion serait donc passablement et diplomatiquement ratée pour le SNE, qui privilégierait alors l'anniversaire de ce Salon, toujours plus cher pour les éditeurs, et qui devrait donc se montrer bien franco-français cette année, au lieu de s'ouvrir vers l'extérieur.
Quant aux éditeurs turcs, on comprend, avec nos confrères, qu'ils soient sous le choc...Nous attendons de plus amples informations sur le sujet.
source - actua-litté - Clement S., le mardi 27 janvier 2009
« Le poisson est un animal dont la croissance est excessivement rapide entre le moment où il est pris et le moment où le pêcheur en fait la description à ses amis. »
The Christian Herald
illustration :
toile de Edouard Leon Cortes

dimanche 25 janvier 2009

curiosité de lecture : miserere de Jean-Christophe Grangé

En cours de lecture
Comme d'habitude, sur fond de "nazis"... nous voilà avec les fantomes du régime de Pinochet... je subodore que Gilles de Rais n'est pas loin d'entrer dans le roman... puisqu'il y est question de musique, d'enfants, d'orgue et d'ogre...

Gouvernement d’Allende

Les États-Unis n'interviennent pas directement dans la campagne électorale, même si la candidature du conservateur Jorge Alessandri est soutenue par la compagnie International Telephone and Telegraph (ITT) (environ 350 000 dollars américains).
Il n’y a pas de comparaison possible avec ce que les entreprises ont donné durant la campagne de Frei, quand il existait une assistance électorale.

Le
4 septembre 1970, lors de sa quatrième tentative, le candidat de l’Unité populaire, Salvador Allende, arrive en tête de l’élection présidentielle avec 36,6 % des suffrages et devance le conservateur Jorge Alessandri (34,9 %) et le démocrate chrétien Radomiro Tomic (27,8 %). Le score d’Allende a reculé de trois points par rapport à sa précédente candidature en 1964.
En l’absence de nouveau tour de scrutin, celui qui arrive en tête doit être confirmé par le Congrès, dominé par les démocrates chrétiens et les conservateurs.
Le 24 octobre 1970, les socialistes (alors partisans de l’instauration d’un État révolutionnaire depuis le congrès de Chillán en 1967) obtiennent des démocrates chrétiens l’investiture d’Allende en échange de la promesse de respecter les libertés et la légalité. Les alessandristes ont peur du gouvernement socialiste, alors que les allendistes et les démocrates-chrétiens expriment leurs joies dans la rue.

Devenu ainsi le premier président élu démocratiquement sur un programme socialiste et disposant d'une majorité parlementaire grâce au soutien des démocrates-chrétiens, Allende intensifie les réformes de son prédécesseur.
Les mines de cuivre (qui représentent les trois quarts des exportations) avaient été nationalisées à 51 % par Eduardo Frei Montalva, Allende exproprie la partie restante sans indemniser les compagnies américaines.
Il accentue sensiblement la politique de redistribution des terres en faveur des paysans pauvres. Beaucoup d'autres entreprises sont réquisitionnées ou nationalisées (dont neuf banques sur dix).

Si les résultats économiques de la première année au pouvoir d'Allende sont bons, les deux années suivantes vont être catastrophiques. L'inflation explose (508 % entre décembre 1972 et décembre 1973), le PIB se contracte (-3,6 % en rythme annuel) et la valeur de la monnaie chilienne chute.
La politique monétaire trop expansionniste et la chute du prix du cuivre d'environ un tiers de 1970 à 1972 sur les marchés mondiaux sont en grande partie responsables de ces résultats désastreux. Le gouvernement tente d'enrayer la crise en fixant les prix des denrées, ce qui provoque un développement du marché noir et des pénuries.
En 1972 commencent les marches des casseroles vides par lesquelles les ménagères expriment qu'elles n'ont plus rien à cuire.

Manifestation soutenant le gouvernement d'Allende.

En mars
1973, les démocrates chrétiens et les conservateurs présentant une liste unique obtiennent 55,6 % des voix aux élections législatives. Malgré une amélioration de son score électorale (44,1 %), l’Unité populaire d’Allende est minoritaire.
Allende est cependant à l’abri d’une destitution, l’opposition ne réunissant pas les deux tiers des voix et des sièges ; il décide alors de gouverner par décret, ce qui lui évite de passer par le Parlement.

Allende tente aussi d'obtenir le soutien actif de la population ; des milices ouvrières se constituent dans les villes et les campagnes pour entretenir la légitimité révolutionnaire du gouvernement.
L'opposition conservatrice et les démocrates chrétiens, incapables de bloquer les décisions d'Allende du fait de la marginalisation du parlement, mobilisent à leur tour la rue. Ils organisent ou apportent leur contribution à une série de révoltes et de manifestations (la plus célèbre étant la grève des camionneurs), qui paralysent le pays alors que son économie est déjà très affaiblie par les réformes d'Allende.
Dans le même temps,on assiste à la montée en puissance de groupes paramilitaires d'extrême-droite et le pays vit une guerre civile larvée où s’opposent les milices d'extrême gauche (MIR) à ces dernières.

Durant l’été 1973, de multiples grèves et des insurrections menacent la stabilité du pays alors que Allende déclare : « Si la révolution ne peut passer en souplesse, elle passera en force. »
Le 23 août 1973, le président Salvador Allende, nomme Pinochet général en chef des armées à la suite de la démission de Prats.

Le rôle des États-Unis

Kissinger, le Secrétaire d'État de Richard Nixon, avait déclaré dans un discours prononcé à l'occasion de l'élection de Salvador Allende : « Je ne vois pas pourquoi il faudrait s'arrêter et regarder un pays devenir communiste à cause de (due to the) l'irresponsabilité de son peuple. »

Les États-Unis cherchent à affaiblir Allende.
Les crédits accordés par les Américains au Chili passent de 300 à 30 millions de dollars et si dans le même temps l'aide des pays socialistes et européens sur-compense cette perte (600 millions de dollars de nouveaux crédits), le Chili demeure très dépendant des États-Unis (notamment pour des pièces détachées) et les répercussions néfastes de cette politique sont nombreuses.

La
CIA est également active, elle disposera sur ces 3 années d'un budget de sept millions de dollars pour soutenir l'opposition démocratique à Allende. Elle l'emploiera principalement pour aider les partis politiques (démocrates-chrétiens et conservateurs, qui recevront la moitié de l'aide), les journaux anti-Allende (El Mercurio, le plus grand quotidien du pays bénéficiera à lui seul d'un cinquième de l'aide) et dans une moindre mesure des organisations privées.
Les groupes paramilitaires d'extrême-droite sont par contre délaissés, Patrie et Liberté ne recevra que 1.000 dollars entre 1970 et 1971 puis plus riche. Les autorités américaines rechignent à aider les grévistes anti-Allende.
La proposition d'un soutien a été abordée plusieurs fois au sein du Comité 40 (chargé de définir et de contrôler les activités de la CIA) mais elle a toujours été repoussée. Une partie des fonds fournis par la CIA aux partis d'opposition et aux organisations privées aurait néanmoins été détournée par ces derniers pour supporter les camionneurs.
Réagissant aux nationalisations effectuées par le gouvernement d’Allende, plusieurs firmes américaines dont l'ITT apportent leur concours à cette stratégie.

L’administration Nixon fut enchantée du coup de 1973.
Mais, si de nombreuses accusations sont formulées, aucun élément ne permet cependant d’affirmer que les États-Unis ont directement participé au coup d’État proprement dit du 11 septembre 1973.
Le rapport de la Commission Church du Sénat des États-Unis, en 1976, a conclu que les États-Unis n’avaient pas eu de rôle direct dans l’événement. Kissinger affirme par ailleurs que les grandes manœuvres américaines étaient terminées à l’époque du coup, ce qui est confirmé par les archives.
Peter Kornbluh, chercheur au National Security Archive, qui a participé à une campagne pour la déclassification des archives de la CIA, déclare à Libération : « si les États-Unis n'ont pas directement participé au complot du 11 septembre 1973, ils ont tout fait pour préparer le coup d'État contre Allende ».
illustration : Henry Kissinger - Photographie prise le 3 mars 1976 par Marion S. Trikosko pour le compte de U.S. News and World Report
Régime Pinochet

Le 11 septembre 1973, un coup d’État mené par le général Augusto Pinochet, renverse Salvador Allende, qui se suicide dans le palais de la Moneda.
Ce coup d’État est accueilli avec soulagement par les démocrates chrétiens et les conservateurs qui espèrent récupérer rapidement le pouvoir.
Mais la junte militaire prend le pouvoir et le conservera jusqu’en 1990, imposant une dictature.
Elle est dirigée par Augusto Pinochet et est composée des commandants en chef des trois armées et du chef de la police.
Ce coup d’État se fait sous le regard des caméras et a un grand retentissement en Europe.

La junte dissout le Congrès national, les conseils municipaux, les syndicats et les partis politiques.
La liberté de la presse est abolie, le couvre-feu instauré.
Tout ce qui est littérature de gauche est interdit.
Les opposants sont arrêtés, torturés, déportés ou exécutés.
En dix-sept ans, le régime du général Pinochet est responsable de la mort ou de la disparition de 2 279 personnes (par comparaison, la dernière dictature argentine est responsable de trente mille morts en sept ans), de l’emprisonnement de plus de 100 000 personnes ; sur le million d’exilés durant cette période, 16 0000 sont exilés politiques.

En
1977, Pinochet confie l’économie du pays aux théoriciens de l’école de Chicago, les Chicago boys, de jeunes économistes chiliens comme José Piñera et Hernán Büchi, souvent formés à l'Université de Chicago et influencés par les idées de Milton Friedman et d'Arnold Harberger.
La croissance atteint 8 % par an pendant 5 ans mais est temporairement ralentie par la crise économique mondiale, qui touche le Chili entre 1982 et 1985 ; sous l’influence de la hausse mondiale de l'inflation, l’inflation nationale atteint 27,3 % en 1982. Celle-ci génère une série de protestations de la population contre le régime politique et le libéralisme. Toutefois, dès 1985, l’économie du pays revient au vert.

Les réformes engagées sont d’inspiration libérale et se caractérisent par la
privatisation de la plupart des entreprises publiques et la baisse des dépenses publiques. Selon Orlando Caputo, économiste à l’Université du Chili, le terrorisme politique et économique des 4 derniers mois de 1973 - à partir du coup d’État du 11 septembre -, parvint à faire baisser la part des salaires dans le Produit Intérieur Brut (PIB) de 52% en 1972 à 37% en 1973. 15% qui équivalent à une diminution de 30% de la masse globale annuelle des salaires.
De 1979 à 1989, la participation des salaires dans le PIB a poursuivi sa chute, alors que les profits ont augmenté. À la fin de la dictature, la part des salaires était descendue à 31 et 32% respectivement et les profits atteignaient 56%.

Paradoxalement, en même temps que le richesse augmente, la pauvreté s'accroît.
Ce n'est un secret pour personne que les statistiques basées sur les revenus "per capita" sont fausses. Lorsqu'on dit que dans un pays chaque habitant mange 100 poulets, on ne tient pas compte de ceux qui ne voient ni les poulets ni leurs os.
En fait, le Chili, avec une population de 13 millions d'habitants, compte 4 millions de pauvres dont 1,5 million d'indigents. C'est un chiffre trop élevé (un tiers de la population) pour un pays montré systématiquement dans les informations internationales, comme un "modèle de croissance économique".
Bien que le chômage et l'inflation aient diminué, les travailleurs, acteurs de l'expansion économique, ont vu s'évanouir la plupart des anciennes conquêtes syndicales. Les salaires sont bloqués et le pouvoir d'achat continue de diminuer.

Le cadre des négociations salariales reste celui dénommé "Plan laboral", créé en 1979 pendant le régime militaire.
C'est un ensemble de lois disproportionnées qui, en favorisant l'employeur, ont atomisé le mouvement syndical chilien, jadis combatif, et ont neutralisé toute tentative de grève et de revendication collective et étouffé la solidarité et l'unité des travailleurs.
Affirmer que les "pauvres sont moins pauvres" ne correspond pas à la réalité.
En 1979, les 10 % les plus pauvres de Santiago percevaient 1,4 % du revenu national ; en 1991, ce même revenu a été ramené à 1,2 %.
Au cours de cette période, les bénéfices des 10 % les plus riches de la capitale sont passés de 39,1% à 41,3 %.
Au niveau national, selon une étude récente de l'Université de Santiago, la participation à la richesse a diminué de 40,4 % à 38,4 % y compris parmi la classe moyenne du pays, tandis que pour les secteurs les plus riches, la moyenne est passée de 55 % à 56,9 %.
*
Le Chili participe activement au
plan condor visant à éliminer physiquement les opposants aux dictatures militaires. Mais le Chili et l’Argentine s’affrontent en 1978 dans le Conflit du Beagle pour la possession de quelques petites îles australes. Ce conflit manque de peu de provoquer une guerre entre les deux pays, et le Chili sera le seul pays d’Amérique du Sud à soutenir politiquement le Royaume-Uni durant la guerre des Malouines.

À partir de
1978, la junte militaire entreprend d’établir une constitution remplaçant la Constitution de 1925 qui est considéré par la junte comme la source de la crise institutionnelle.
Celle-ci est élaborée par la Commission Ortúzar dirigé par Enrique Ortúzar et Jaime Guzmán. Cette loi fondamentale contenait des dispositions transitoires et devait entrer en vigueur 16 ans plus tard.
Elle installait Pinochet comme président pour huit ans et prévoyait une période additionnelle de huit autres années de gouvernement militaire, avec un candidat unique désigné par les autorités militaires et qui devait être ratifiée lors d’un plébiscite. Elle remplace le système proportionnel par un système binominal lors des élections et l’établissement d’un second tour dans les élections présidentielles et instaure un Tribunal Constitutionnel chargé de valider les lois.

La constitution est approuvée après un plébiscite qui a lieu le
11 septembre 1980. Le scrutin, organisé dans des conditions controversées, donne 67 % pour le Oui. Pinochet est reconduit au pouvoir pour huit ans.

En
1988, Pinochet demande la prolongation de son mandat par référendum mais n’obtient que 44,01 % d’approbation, contre 55,99 % de votants qui demandent son départ et la fin de la dictature. Il organise alors une transition en douceur vers la démocratie (tout en se garantissant une immunité constitutionnelle).

L'opération Condor (en espagnol : Operación Cóndor) est le nom donné à une campagne d'assassinats et de lutte anti-guerilla conduite conjointement par les services secrets du Chili, de l'Argentine, de la Bolivie, du Brésil, du Paraguay et de l'Uruguay au milieu des années 1970.
Les dictatures militaires alors en place en Amérique latine — dirigées à Santiago par Pinochet, à Asunción par Stroessner, à Buenos Aires par Videla, à Montevideo par Bordaberry, à Sucre par Banzer et à Brasilia par Geisel —, ont envoyé des agents secrets poursuivre et assassiner les dissidents politiques jusqu'en Europe (France, Italie, Portugal, Espagne...) et aux États-Unis (phase 3 de l'opération Condor, qui culmina avec l'assassinat de l'ancien ministre d'Allende, Orlando Letelier, en septembre 1976 en plein Washington D.C.).
Diverses techniques de terreur étaient employées par les services secrets, allant de la noyade jusqu'à la transmission d'enregistrements sonores de cris de proches torturés aux « vols de la mort » au-dessus du Rio de la Plata.
La terreur d'État visait explicitement les « guérilleros terroristes gauchistes » (Tupamaros en Uruguay, Mouvement de la gauche révolutionnaire (MIR) au Chili, Montoneros en Argentine, etc.) au nom de la dite « doctrine de sécurité nationale », bien qu'elle ait en réalité touché n'importe quel « dissident potentiel » ainsi que leurs proches (famille et amis).
L'État argentin a d'ailleurs cherché à justifier les actes de terrorisme commis au début des années 1980 en invoquant la « théorie des deux démons », qui mettait sur un pied d'équivalence les crimes commis par les juntes militaires et leurs escadrons de la mort et l'action révolutionnaire des groupes armés de gauche.
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Le plan Condor a été une étape très importante dans l'évolution des méthodes de répression et de lutte anti-subversion. L'un des aspects les plus novateurs est le secret entourant l'opération : la répression s'est organisée dans une discrétion absolue, aucune information ne devait filtrer des camps de rétention ou des lieux de tortures, les victimes étaient le plus souvent achevées et leurs dépouilles éliminées, par exemple en les jetant à la mer ou en les brûlant. On parle de desaparición forzada (disparition forcée).
Un autre aspect important de l'opération est la coopération régionale entre plusieurs États et la mise en place d'actions extérieures jusqu'en
Europe. Environ cinq cents enfants, généralement nés en captivité, ont été enlevés à leurs parents pour être confiés à des couples stériles, politiquement proches du pouvoir.

Un escadron de la mort est le nom couramment donné à un groupe armé qui organise, généralement en secret, des exécutions sommaires ou des enlèvements d'activistes, de dissidents, des supposés opposants politiques ou économiques (par exemple les sans-abris) ou toute personne perçue comme interférant avec un ordre social ou politique établi.
Les escadrons de la mort sont souvent associés, d'une manière ou d'une autre, aux méthodes de répression orchestrées par les dictatures ou les régimes totalitaires. Ils mettent en œuvre une politique de terrorisme d'État décidée ou avec l'accord tacite des plus hauts échelons du pouvoir.
Les escadrons de la mort peuvent être une police secrète, un groupe paramilitaire ou une unité spéciale d'un gouvernement où ont été détachés des membres de la police ou de l'armée.

On distingue en général, les escadrons de la mort des
terroristes dans le fait que leur violence est utilisée pour maintenir un statu quo plutôt que pour rompre avec l'ordre social existant.

historiquement
Bien que le terme d'« escadron de la mort » ne fut popularisé qu'avec l'émergence de ces groupes en Amérique centrale et du Sud pendant les années 1970 et 80, l'existence de ces escadrons est attestée en bien d'autres lieux et époques : ainsi, après la guerre de Sécession américaine, certains groupes affiliés au Ku Klux Klan eurent des activités apparentées à celles d'escadrons de la mort envers les noirs des États du Sud. Après la chute du Kaiser allemand, des escadrons d'anciens combattants, les Freikorps, furent également utilisés dans les années 1920 pour mater les révoltes communistes.
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C'est cependant au cours des
années 1930 que l'utilisation des escadrons de la mort au service de la répression prend vraiment de l'ampleur. Le gouvernement soviétique de Joseph Staline met en place des unités spéciales du NKVD pour traquer et éliminer les opposants politiques durant les Grandes purges. Nombreux seront les simples passants raflés et exécutés pour avoir été au mauvais endroit au mauvais moment.
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Adolf Hitler fait à la même époque un usage tout aussi massif des escadrons de la mort, commençant lors de la Nuit des Longs Couteaux et culminant lors de l'invasion de l'Union soviétique en 1941. Suivant la progression de la Wehrmacht, quatre unités spécialisées, les Einsatzgruppen A à D s'occupaient d'éliminer juifs, communistes, partisans et autres « indésirables » dans les zones occupées de l'Est. Entre 1941 et 1944, le nombre de victimes de ces Einsatzgruppen a été estimé à près de 1,2 millions de personnes.
*
Toujours pendant la
Seconde Guerre mondiale, l'Armée impériale japonaise utilise également des escadrons de la mort pour terroriser et soumettre les populations des territoires nouvellement conquis.
La France pourrait également avoir une responsabilité dans l'exportation des techniques de guerre subversive utilisées pendant la guerre d'Algérie.
De nombreux anciens membres de l'OAS ont trouvé refuge en Amérique latine. Comme l'a reconnu Pierre Messmer alors ministre des Armées, le gouvernement français a mis en place de 1959 à 1981 une mission militaire française permanente à Buenos Aires qui fournissait des conseillers aux troupes argentines.
Des contacts ont également pu exister avec d'autres pays : le général Paul Aussaresses a ainsi été attaché militaire au Brésil en 1973.

Dans un documentaire de
Marie Monique Robin, Escadrons de la mort, l'école française, le général Contreras, ex-chef de la DINA, y déclare notamment : « C’est la DST qui a le plus coopéré.
C’était un service de renseignement ami. » Peu après les députés Noël Mamère, Martine Billard et Yves Cochet présentent une proposition de résolution « tendant à la création d'une commission d'enquête sur le rôle de la France dans le soutien aux régimes militaires d'Amérique latine entre 1973 et 1984.».
La commission des Affaires étrangères, alors présidée par Édouard Balladur, est chargée d'examiner la recevabilité de cette proposition. Le député UMP Roland Blum, en charge du travail de la Commission, refuse d'entendre Marie-Monique Robin, et publie en 2003 le rapport N° 1295 du 24 décembre 2003, qui refuse la création d'une commission d'enquête, au motif que :

« (...) les allégations portées sur le rôle de la France en Amérique latine dans les années 1970 sont sans fondement sérieux. Elles reposent en effet largement sur des raccourcis discutables liés à la prétendue invention par l'armée française du concept de "guerre subversive". Dans ces conditions, il ne semble pas opportun de créer une commission d'enquête sur le rôle que la France aurait joué dans la répression menée par les dictatures latino-américaines entre 1973 et 1984, qu'elle a toujours condamnées. ».

Lors de son voyage au Chili en février 2004,
Dominique de Villepin, alors ministre des Affaires étrangères, nie toute coopération entre la France et les dictatures latino-américaines .

S'appuyant sur ce même documentaire, l’amiral argentin
Luis Maria Mendia, idéologue des « vols de la mort » lors de la « sale guerre » menée par la dictature argentine de 1976 à 1983, a demandé en janvier 2007, au cours de son procès pour crimes contre l’humanité, à l'ex-président Valéry Giscard d’Estaing, à l’ancien premier ministre Pierre Messmer, à l’ex-ambassadrice à Buenos Aires François de la Gorce et à tous les officiels en place à l’ambassade de Buenos Aires entre 1976 et 1983 de comparaître devant la cour en tant que témoins. Alfredo Astiz, l’ « ange de la mort », avait émis une requête similaire lors de son procès .