lundi 9 novembre 2009

John Crowley : l'orée des bois, tome 1 du Parlement des fées

Cette histoire est un peu comme ces poupées russes que l'on emboitent...
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un labyrinthe (la maison) dans un labyrinthe (le pays) dans un labyrinthe (un autre monde), tout comme les personnages d'ailleurs...
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illustration : "la liseuse" de Mark Kostabi
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On peut voir cette histoire comme celle d'un monde perdu au coeur d'un labyrinthe... une sorte d'hétérotopie, les habitants de ce monde devront cheminer longtemps avant de pouvoir arriver à la connaissance... et certains s'égareront, c'est un voyage initiatique des hommes, avec au coeur, des femmes, trois... telles des pythies ou des sybilles...
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Les personnages font penser à la mythologie... et a certains contes de fées... où le temps et l'espace se mélent et s'emêlent dans une spirale de plus en plus folle... où il n'est pas toujours facile de s'y retrouver.
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comment ne pas songer à Apollon et Peter Pan pour Auberon, à Cassandre pour Nuage, a Alice au pays des merveilles pour Sophie... etc.
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Nuage, la plus ancienne, maîtresse des cartes, devineresse, sa fille a qui elle transmet son art et sa connaissance, a sa fille, puis sa petite-fille...
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Puis viennent prendre le relais les trois soeurs d'Auberon, qui elles aussi tissent la toile du temps... et posent les questions... sans jamais y répondre... Ce sont les femmes qui sont gardiennes de la mémoire... L'histoire n'est que question ... qui, quoi, quand, comment ? mais il en reste une... qui échappe, et c'est bien : pourquoi !
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Voilà les impressions de lecture que je ressens à la fin du premier volume. Un livre pas si facile a lire, mais que de plaisir a se perdre dans l'histoire, c'est comme visiter un monde enchanté et ténébreux... une forêt de Brocéliande...
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Il me semble totalement impossible d'en faire un compte-rendu sans avoir lu le deuxième volume. donc, je ne vous livre que des impressions de lecture...
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Un labyrinthe

est un tracé sinueux, muni ou non d'embranchements, d'impasses et de fausses pistes, destiné à perdre ou à ralentir celui qui cherche à s'y déplacer.
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Le cheminement du labyrinthe est difficile à suivre et à saisir dans sa globalité.
Le labyrinthe est aussi un archétype de la Connaissance.
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Son itinéraire se situe entre les Cornes du Monstre que l'initié doit affronter. Son parcours est un chemin d'épreuves correspondant à l'imagerie symbolique d'un pont à traverser.
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Ce pont archétypal est dénommé, dans la tradition mazdéenne Pont de Cinvat. Il sépare deux univers selon Henry Corbin. Le passage d'un univers à l'autre s'effectue au prix de cette traversée qui s'accomplit selon des stratégies précises, où rien n'est laissé au hasard, à l'instar de la sortie d'Égypte. Les directives devant mener à la sortie du labyrinthe sont consignées dans les rites et traditions.
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Le labyrinthe est également symbole de voyage. Union entre la
spirale et la tresse, il représente un voyage différent selon le but recherché : le traverser ou atteindre son centre.
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Dans le premier cas, l'épreuve est unique (le dernier voyage de l'homme vers la mort, ou le passage vers l'au-delà).
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Dans le second cas, l'épreuve peut être double, triple... car après avoir atteint le centre, encore faut-il pouvoir ressortir. C'est l'image même de l'individu qui traverse une épreuve (physique, psychologique...), et qui doit sacrifier une partie de lui-même pour survivre.
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Celui qui a réussi devient un initié ; il entre dans une nouvelle vie (d'où l'importance des rites initiatiques depuis les hommes préhistoriques). Le face à face avec la mort permet à l'individu sa résurrection.
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Pour Alain Benoist, le thème du labyrinthe associe une construction royale et une promesse non tenue, qu'il s'agisse du roi Minos et du labyrinthe, de la construction des murailles de Troie, ou de la forteresse d'Asgaard... En outre, le thème implique obligatoirement une femme ou une déesse (Hélène pour Troie, Ariane en Crète),
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En psychologie, la mémoire est la faculté de l'esprit permettant de stocker, conserver et rappeler des expériences passées et des informations.
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Pythie et Sibylle


Quelles différences entre sibylle et pythie ?
















Premièrement, la Pythie a un statut institutionnel, elle est associée au sanctuaire de Delphes, alors que la Sibylle donne une divination occasionnelle, indépendante, nomade.
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illustration : La Sibylle de Delphes, fresque de Michel-Ange (15081512)
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Deuxièmememnt, la Pythie n'est que le porte-parole du dieu, elle répond aux questions qui lui sont adressées, alors que la Sibylle parle à la première personne, revendique l'originalité de sa prophétie et le caractère indépendant de ses réponses.
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Troisièmement, on imagine la Pythie jeune (c'est, à l'origine, une jeune fille vierge), mais la Sibylle vieille.
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Quatrièmement, la Pythie apparaît en Grèce après la première Sibylle (Hérophile), les Sibylles sont venues d'Asie Mineure au VIIIe siècle av. J.-C. Cinquièmemement, malgré certaines images poétiques (Lucain, Virgile), la Pythie est plutôt posée, même si elle est en transe, alors que la Sibylle "dit l'avenir d'une bouche délirante".
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illustration : La Sibylle de Cumes, peinture florentine de Andrea del Castagno
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L'hétérotopie
(du grec topos, « lieu », et hétéro, « autre »: « lieu autre ») est un concept forgé par Michel Foucault dans une conférence de 1967 intitulée « Des espaces autres ».
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Il y définit les hétérotopies comme une localisation physique de l'utopie.
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Ce sont des espaces concrets qui hébergent l'imaginaire, comme une cabane d'enfant ou un théâtre. Ils sont utilisés aussi pour la mise à l'écart, comme avec les maisons de retraite, les asiles ou les cimetières.
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Ce sont donc des lieux à l'intérieur d'une société qui en constituent le négatif, ou sont pour le moins aux marges.
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Michel Foucault dégage alors cinq principes permettant une description systématique des hétéropies :
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- les hétérotopies sont présentes dans toute culture,
- une même hétérotopie peut voire sa fonction différer dans le temps,
- l'hétérotopie peut juxtaposer en un seul lieu plusieurs espaces eux-mêmes incompatibles dans l'espace réél, au sein d'une hétérotopie existe une hétérochronie, à savoir une rupture avec le temps réel,
- l'hétérotopie peut s'ouvrir et se fermer ce qui à la fois l'isole, la rend accessible et pénétrable.
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Longtemps les géographes se sont posé quatre questions majeures lorsqu'ils regardaient la Terre, s'inscrivant en cela dans une démarche descriptive et analytique :
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Qui :
Les individus/les sociétés produisent leur espace avec leurs valeurs, leurs modes de vie.
C'est la géographie des aires culturelles, qui cherche à montrer le particulier ;
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Quoi :
L'impact de ces hommes, qu'il soit économique, social, ou environnemental, produit de leurs institutions, de la recherche, des techniques, des échanges ou encore de l'exploitation des ressources naturelles ;
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Le lieu de ces activités humaines ; plus généralement la raison des localisations ;
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Quand :
La période historique où les individus ou les sociétés produisent des espaces qui s'ajoutent ou concurrencent les précédents. Cette question traduisant du reste la situation de subordination de la géographie vis-à-vis de l'histoire, à laquelle elle fournissait un décor.
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illustration : Vermeer, Le Géographe, 1669, conservé au Städelsches Kunstinstitut, à Francfort-sur-le-Main
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Les Grecs sont la première civilisation connue pour avoir étudié la géographie, à la fois comme science et comme philosophie. Thalès de Milet, Hérodote (auteur de la première chorographie), Ératosthène (première carte du monde connu – l'écoumène –, calcul de la circonférence terrestre), Hipparque, Aristote, Ptolémée ont apporté des contributions majeures à la discipline.
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Les Romains ont apporté de nouvelles techniques alors qu'ils cartographiaient de nouvelles régions.
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Ces premiers « géographes » développent quatre branches de la géographie qui vont perdurer jusqu'à la
Renaissance :

découvrir et explorer les continents ;
mesurer l'espace terrestre (géodésie) ;
situer la Terre dans les systèmes astronomiques (cosmographie) ;
représenter l'espace terrestre (cartographie).


Les univers imaginaires,
en permettant de projeter ses fantasmes, permet de libérer les tensions et de « purger les passions ». Ce rôle cathartique contribue à la paix sociale.
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Par ailleurs, de même que
La Fontaine utilisait les animaux pour critiquer la société des hommes, de même que les philosophes des Lumières utilisaient les pays lointains comme métaphore de la société française (pour contourner la censure), les mondes imaginaires peuvent être des métaphores de notre monde et de notre société ;
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on peut citer Micromégas de Voltaire.
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Les auteurs peuvent également montrer les dangers de nos modes de vie en montrant une société qui les pousserait à l'extrême.
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On peut ainsi citer 1984 de George Orwell, Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley, Les Cavernes d'acier d'Isaac Asimov (le racisme envers les robots, et de manière générale sa réflexion sur l'intelligence artificielle dans son cycle des robots), Tous à Zanzibar de John Brunner, Le Seigneur des Anneaux de J.R.R. Tolkien...
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Les univers imaginaires, et de manière générales les œuvres de fiction, font souvent ressortir une ou plusieurs dualités. La plus classique est la dualité bien/mal, mais il apparaît également très souvent une dualité loi/chaos.
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Ceci n'est pas valable que pour les
mondes de fiction (notamment d'heroic fantasy), mais aussi pour la plupart des mythologies. Les égyptiens de l'Antiquité, tout comme certains jeux de rôle médiévaux-fantastiques, ne s'intéressent pas à une dualité, mais à deux.
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Pour caricaturer, le bien (
Horus) contre le mal (Seth) et l'ordre (Maât) contre le chaos (Apophis). Ainsi, on voit parfois Seth s'y joindre à Horus pour combattre Apophis. C'est la thématique du « mal nécessaire » (la guerre par exemple, les peines pénales...), du « juste milieu » (le neutre-neutre de Donjons et Dragons) et l'incompatibilité entre « bien » et « loi ». Ils opposaient Maât (à la fois ordre, socle, justice et victoire) et l'ensemble des forces chaotiques qui menaçaient le monde.
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D'une manière générale, beaucoup de civilisations se voyaient comme des îlots d'ordre cernés par des forces chaotiques (lire
barbare). Mais, alors que cette lutte entre deux principes antinomiques étaient pour ces peuples une manière de comprendre les aléas de l'existence (les bonnes récoltes étaient due à une victoire du principe d'ordre, les années de disette à celle du principe opposé), elle est devenue dans les mondes imaginaires modernes le principe qui rend l'histoire possible.
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L'écrivain moderne qui a véritablement mis en avant la dualité ordre/chaos est sans doute
Michael Moorcock, l'intégrant dans ses concepts de Multivers et de Champion éternel.
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Peter Pan

Ce vendredi soir, la voie est libre pour Peter Pan, le petit garçon qui refuse de grandir : Mr et Mrs Darling sont absents et la chienne Nana, qui tient lieu de nurse à leurs enfants Wendy, John et Michael, a été enchaînée dans le jardin.
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Venu récupérer son ombre abandonnée lors d’une précédente visite, Peter se trouve face à Wendy. Avide des histoires qu’elle pourra lui raconter et du rôle de mère, fantasmé, qu'elle pourrait accomplir, il la persuade de le suivre jusqu’au
Pays imaginaire (Neverland ou en néerlandais Fantasieland)
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Wendy devra s’y défendre de la jalousie de la fée Clochette (Tinker Bell) et veiller sur la petite famille des garçons perdus, jadis tombés de leur landau, dont elle devient la mère. Emmenés par Peter Pan, Wendy et ses frères vivront d’extraordinaires aventures auxquelles seront mêlées les Peaux Rouges et Lily La Tigresse (Tiger Lily), mais surtout les Pirates et leur chef, le fameux
Capitaine Crochet (traditionnellement joué dans les adaptations par le même acteur que Mr. Darling, le père des enfants), qui n’a jamais pardonné à Peter de lui avoir coupé la main avant de la jeter en pâture au Crocodile qui le poursuit depuis sans trêve...
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Le thème principal et le plus évident est le fait de grandir… ou non.Peter veut rester un enfant pour toujours, et éviter les responsabilités de l'âge adulte, il s'enferme en quelque sorte dans le monde de l'enfance.
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Par là, Peter Pan est aussi un livre sur la mort, et sur la peur de la mort, raison de la volonté de Peter de ne pas grandir. La mort est très présente dans l'œuvre, sous différentes formes : elle est symbolisée par le crocodile-horloge, elle est la terreur du Capitaine Crochet (qui la fait pourtant subir à bon nombre de personnages) et de Peter (en cela, ils se ressemblent), mais elle est aussi thématisée indirectement par certains motifs récurrents de l'œuvre, notamment par l'oubli.
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Certains commentateurs y voient aussi le thème de l'éveil de la sexualité chez Wendy, et les sentiments freudiens de Peter envers une figure maternelle, et ses sentiments conflictuels pour Wendy et la fée Clochette (Tinkerbell). Elles représentent chacune une femme idéalisée différente. On peut en fait déterminer au moins quatre archétypes inaccessibles à partir des personnages féminins : Wendy, Clochette, les Sirènes, et Lily.

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