De la fenêtre de son hôtel, François Vallejo est l’un des premiers à entendre le grondement des flammes, à voir le ciel se métamorphoser, à sentir les couleurs de l’incendie, le rouge, le jaune… grimper à toute allure les étages des magasins.
Cette image s’est imprimée dans son regard et il restitue, vingt ans plus tard, des sensations, des émotions par le biais de cinq personnes qui refusent d’évacuer les lieux, pour s’enfoncer dans les décombres et les cendres...
« Il s’arrête et respire un grand coup. Les autres en profitent pour sortir de leur engourdissement. Il faut se détacher de lui.
C’est plus facile, sans sa voix. Ils voudraient ne plus l’avoir devant eux ; chercher d’autres regards humains, partager les mêmes pensées, pour se rassurer, se dire qu’ils ne sont pas comme ça, eux.
Pas acceptable, avoir mangé, bu, parlé avec lui, l’avoir écouté surtout. Ils ne pouvaient pas imaginer. Ils se sont fait avoir. Ils ont été embarqués malgré eux. Ils n’avaient aucune raison de rester dans cette ville en feu. Pourquoi n’ont-ils pas fait comme tout le monde ?
Il n’est pas un homme comme eux, pas un homme du tout. Il va nous contaminer, il l’a dit. C’est déjà fait, peut-être. »
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François Vallejo est né au Mans en 1960. Passionné par Claudel, puis par Louis-Ferdinand Céline, il fait des études de lettres. Actuellement il enseigne les lettres classiques et habite Le Havre.
En 2004, il a obtenu le Prix des Libraires et le Prix Culture & Bibliothèque pour Groom. En 2001, François Vallejo a reçu le prix Roman France-Télévisions pour Madame Angeloso.
Madame Angeloso a fait partie de la seconde sélection du Goncourt 2001 qui fut finalement attribué à Jean-Christophe Rufin. Pour le même roman, François Vallejo fut sélectionné pour les prix Femina et Renaudot. Il reçoit le Prix du Livre Inter en 2007 pour Ouest. (wikipédia)
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Livre lu :
Un soir, aux tréfonds des terres normandes, un garde-chasse se découvre un nouveau maître.
Le vieux baron de l'Aubépine est mort, un fils le remplace.
Lambert était un serviteur à l'âme trop près de ses bois pour s'entendre avec ce l'Aubépine le Jeune pétri de folies politiques, d'obsession des corps et de maladie rentrée.
Et pourtant... Ouest, c'est l'histoire d'un huis clos où deux hommes se détruisent dans l'indifférence d'un paysage.
La terre détrempée s'englue sur les chaussures, la pluie colle aux yeux, les odeurs de gibier flottent sans fin et les mâtins sont seigneurs des forêts.
Ouest, c'est l'histoire d'une jeune fille à la peau de dentelle, d'ingénues fines et de demi-mondaines égarées. Dans le château des Perrières, le calvados sert l'oubli, et l'inquiétude, insidieuse, enténèbre les chairs
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autres livres :
" Mon voisin ressasse ses tempos, déverse sous mes pieds de doux grondements d'essieux : à peine une pause, pauvre insomniaque. La vie d'un homme ne se voit pas, elle s'entend.
Je suis le rythme de cet homme-là, je suis son cœur, son pouls, imprégné de sa musique comme d'une odeur ".
Géo, médecin au Havre, s'installe dans un nouvel appartement avec sa compagne Célestine.
Leur voisin se révèle animé par une singulière passion : la musique de bal. Ainsi, Monsieur Emile, jour et nuit, écoute très fort valses et musettes, tangos et charlestons.
C'en est trop pour notre médecin qui, perfide, glisse à son voisin, en forme d'aveu agacé, qu'il travaille sur une thèse dont le sujet est... le bal à travers les siècles ! Bien mal lui en prend...
Récit enlevé, aérien, le roman de François Vallejo est le portrait attendri, drôle et profond, d'une vraie relation humaine
Rousseau, Diderot et Grimm ont-ils fait ensemble le Voyage d'Italie ?
Seul, Lambert, valet d'exception, pourra vous en convaincre : " Ma mère m'a donné la vie sans prévenir sur une table d'office, à l'heure du souper, entre potage à l'oseille et entremets, la cuisinière, à ce qu'on m'a dit, coupant ce qui me rattachait à ma mère de son couteau le mieux affilé, comme de la pane de mouton.
J'ai manqué d'être bouilli par une servante habituée à plumer la volaille, n'ayant pas trouver de meilleure idée que de ma tremper dans une eau tout juste sortie du feu pour m'ôter la saloperie visqueuse dont elle me voyait enduit.
Lavé d'un jaune d'œuf fraîchement pondu, gratté comme une jeune carotte, rincé, séché, serré dans des langes et couché sur un lit de poireaux, j'ai attendu sans pleurer, à ce qu'on m'a dit longtemps après, dans un panier, la fin d'un grand souper, au milieu des allées et des venues de tous les gens de cuisine, tandis que ma mère recouverte d'un drap se désespérait de manquer à son service. "
Gibbon, drôle de nom pour un drôle de garçon, "bancal et délabré".
C'est l'identité choisie par le narrateur après que son père est mort en hurlant son nom. Sa mère n'a pas survécu longtemps.
On ne commence pas plus mal sa vie, surtout quand on est doté de bras démesurés et d'une maladresse tenace.
Orphelin, Gibbon est pris en charge par le docteur Delafosse, "bonimenteur à la journée, oracle désabusé".
La charge ne s'éternise pas, le bon docteur meurt, et le destin de Gibbon de se jouer chez Victor, directeur d'un asile psychiatrique en banlieue parisienne.
Un drôle de gus aussi, passionné par la restauration de meubles, bon bougre et grigou, loufoque, "mandarin sévère ou plaisantin de café" : histrion grand pontife pour lequel le héros sera le livreur, l'assistant.
Une existence remplie de chaises, d'armoires, de confituriers, de guéridons, de rencontres féminines comme celle de Tatiana, fille d'artistes hauts en couleur. Avec elle, Gibbon et Victor formeront un trio désopilant, écumant toutes les salles de ventes...
Roman initiatique où le bonheur de conter s'épanouit dans un style vif et alerte, Pirouettes dans les ténèbres est un récit tout en mouvement, sans relâchement, dans un décor original, habillé de personnages extravagants.
" Mais que pouvait-il bien faire au musée national d'Art moderne, aux heures de bureau ? se répétait-elle, tout au long de sa marche aveugle.
Un homme assidu, des expositions, Antoine ? Première nouvelle.
Chez eux, Antoine Carmi est déjà là" - Tu rentres seulement C'est lui qui a parlé le premier, de dos toujours, sa voix semblait lointaine. Elle a hésité avant de mettre tout un poids d'interrogations dans la plus banale des question- Ça va bien - Pourquoi ça n'irait pas - Tu pourrais avoir besoin de te remettre- Me remettre de quoi ?
La bonne question, la plus simple des questions, Véra Carmi ne parvient pas à l'énoncer. Et cette incapacité emporte la spirale dans laquelle elle tombe, celle de l'histoire d'Antoine, de Mlle Rotheim et d'une série de tableaux de Soutine, où explose la tache rouge lumineuse des Groom
" Il faudrait que je comprenne ce qui s'est passé entre nous, à cette époque précise, comment nous en sommes arrivés à cette proximité, puis, de nouveau, à certaines distances.
J'ai tourné autour de cettequestion, j'ai toujours fini par buter sur un noyau insécable, le noyau Angeloso, trop dur pour moi.
"A l'occasion de la mort aussi brutale que singulière de Madame Angeloso, trois personnages qui ont bien connu l'ensorcelante et gouailleuse tenancière d'un hôtel de Dunkerque se souviennent :
Angelino, son fils, qui lui voue une rancune tenace et l'accuse del'avoir négligé, Coquemar, vérificateur des navires, qui l'a aimée avec passion,
et Danuta, Polonaise sur laquelle elle a veillé tendrement. Un récit virtuose, un formidable portrait impressionniste d'une femmeaussi fascinante que mystérieuse.
Après la lecture passionnante de "Ouest", inutile de dire que j'ai envie de lire d'autres ouvrage de l'auteur ; et la lecture des résumés de chacun d'entre eux me tente.
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Nouveautés chez l'éditeur :
Nouveautés chez l'éditeur :
http://www.viviane-hamy.fr/a-paraitre.asp
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