mardi 10 juin 2008

Graham Masterton : Descendance

horreur
1943. L'Europe est dévastée par la guerre James Falcon, éminent spécialiste des strigoï ; les vampires qui infestaient autrefois les forêts les plus reculées de Valachie, , est contacté par le contre-espionnage américain.
Sa mission : traquer et éliminer les strigoï qui combattent aux côtés des nazis et déciment les rangs de la Résistance en France, en Belgique et aux Pays-Bas.
Mais le plus redoutable d'entre eux, Dorin Duca, lui échappe. Quatorze ans plus tard, une nouvelle mission l'envoie cette fois en Angleterre, où plusieurs massacres commis dans la banlieue de Londres portent la signature des strigoï ; conduits par Dorin Duca, mystérieusement réapparu.
James, avec l'aide de Jill, une jeune femme d'une sidérante beauté et maître-chien émérite, dirige les investigations pour mettre fin à ces tueries. Mais il est loin de se douter de la révélation finale...
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Biographie de l'auteur :
Graham Masterton, né à Edimbourg en 1946, est l'un des auteurs d'horreur les plus renommés et populaires au monde, privilège qu'il partage avec Stephen King et Dean Koontz.
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Auteur de plus de trente-cinq romans d'horreur, mais aussi policier, jeunesse... ainsi que de manuels d'érotisme vendus à trois millions d'exemplaires (il a été rédacteur en chef de Penthouse), il a commencé sa carrière en 1976 avec Manitou, best-seller immédiat qui fut adapté au cinéma avec Tony Curtis.
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Site officiel de l’auteur (en français) : http://www.penofchaos.com/masterton/
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Les mythes de la littérature fantastique revus par Masterton.
Contrairement aux apparences, l’œuvre de Masterton est culturelle.

Chacun de ses romans nous apprend quelque chose de passionnant pour peu qu’on soit un peu curieux des mythes et légendes qui ont jalonné l’histoire de l’imagination humaine.

Il a très bien compris que la base de données de ces thèmes était si riche qu’on était très loin de l’avoir épuisée. C’est ce qui est vraiment intéressant dans cette œuvre.

Des démons japonais de « Tengu » aux contes de fées de « Hel », en passant par les légendes indiennes de « Manitou », Masterton nous donne à penser que de notre patrimoine collectif de l’imaginaire, nous viennent nos terreurs enfantines qui ne nous quittent jamais.
Ces terreurs remontent à notre conscience lors de nos rêves. C’est pourquoi, ces derniers sont très présents dans les histoires de Masterton.

Les romans de Masterton sont tous construits de la même manière, basés sur un thème éminemment fantastique, celui de l'apparition de créatures, d'entités, de démons venus d'ailleurs ou de la transformation d'humains en ce type de créature.
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Ainsi, un objet (épave de bateau, char abandonné de la dernière guerre, armoire...) ou même un être humain devient le siège d'un démon qui peut ouvrir les portes de l’Au-delà. Le héros devra trou-ver le moyen de les refermer.
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Voyons d'abord les histoires comportant des objets magiques.

Même « Démences », roman qui ne met pas véritablement en scène les démons, mais des déments ayant accédé au savoir occulte des Druides grâce aux livres anciens de la bibliothèque de l'asile, utilise un objet magique, accessoire incontournable des histoires de Masterton.

Cet objet est la flûte d'Hamelin de la légende. Mais il y a aussi l'armoire de « La vengeance de Manitou », le sac en toile du « Jour J du Jugement », le tableau du « Portrait du mal », l'eau des « Puits de l'Enfer », le parquet de la bibliothèque de « Walhalla »...
Les effets de l'objet maléfique, porte ouverte vers l'univers du Mal sont contrecarrés par l'objet béni. C’est le cas des neuf sceaux de « Les Guerriers de la nuit » qui sont des morceaux de la robe des apôtres.
Hélas, l'imagination n'est pas toujours au rendez-vous lorsqu'il s'agit bêtement d'eau bénite ou d'un ordinateur. Mais le Mal lui-même peut engendrer son contraire, le Bien.
Dans « Sang impur », ce sera l’écu donné à Judas en récompense de sa trahison qui permet-tra au shériff de détruire Janek-le-Vert. Dans « La Vengeance du Manitou », les hommes-médecine ont emmené avec eux les fantômes des victimes du massacre dont l'esprit leur a permis de venir. Ce sont ces fantômes qui viendront à bout des méchants « sorciers » revenus venger les Indiens des méfaits des hommes blancs. C'est l'occasion pour Masterton de reprendre un thème fascinant de la littérature fantastique, celui du « Signaleur » de Dickens,
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le fantôme qui apparaît constamment au héros pour l'avertir d'un danger. Ce thème favori d'Henri James (« Le Tour d'Ecrou ») sera utilisé aussi par Masterton dans « Démences ». D'ailleurs, les objets ont tous une vie, un « manitou » (« Manitou ») et l'histoire de l'homme en bois animé par l'esprit de l'homme-médecine renvoie ma mémoire vers un sketch écrit par Stephen King dans le film « Creepshow ».
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Un autre objet revient systématiquement dans les histoires de Masterton, la plupart du temps bénéfique, car c'est lui qui apporte la solution au problème, c'est le livre. Les manifestations cruelles des démons étant mystérieuses, le héros trouve toujours le moyen de rencontrer un vieillard érudit, savant, prêtre ou homme de loi, qui possède une bibliothèque très ancienne, le journal d'un vieil aïeul, texte qui apporte les explications nécessaires.
Le procédé littéraire de Masterton est dévoilé par un de ses héros dans « Manitou » lorsqu'il déclare : « J'ai toujours été étonné de voir avec quel empressement et quelle rapidité les gens acceptent l'occulte et le surnaturel, dès qu'une preuve se présente à leurs yeux. »
Masterton accumule donc pour le lecteur les « preuves » des manifestations effrayantes, son héros étant témoin contre tous de ces preuves. Ces dernières étant réunies, alors là seulement l'explication est donnée par un texte ancien. Ce mythe du vieux manuscrit se répète à chaque histoire dont il constitue toujours un tournant. Le roman perd alors tout son mystère pour devenir simplement terrifiant.
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Cette terreur s'appuie sur un sentiment profond de culpabilité d'autant plus terrifiant qu'il est inconscient et envoie en guise de punitions des messages effrayants au conscient. Ce qui nous amène à la folie, toujours meurtrière et sadique chez Masterton.
C'est le thème central de « Démences ». L'humour est d'ailleurs toujours présent dans ces textes. Ainsi dans cette histoire de fous ayant réussi à vivre dans les murs de l'asile, l'objet exorciseur est de l'eau bénite (bof ! ) contenue dans une bouteille de Perrier. Or, la publicité de Perrier n'était-elle pas : « Perrier ! C'est fou ! »
La folie, pour Masterton est l'œuvre du démon. « La folie est un mot humain qui décrit presque toujours les activités des démons », déclare le démon Elmek au héros du « Jour J du Jugement ». « Démences » permet à Masterton de rendre un hommage appuyé aux légendes celtiques et au « Passe-Muraille » de Marcel Aymé.
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Les fantômes hantent souvent les histoires de Masterton. Ils sont rarement bons, sauf le « Signaleur » de « La Vengeance du Manitou », qui sauvera le monde avec ses autres collègues fantômes. Mais ailleurs, les fantômes sont toujours l'œuvre des démons.
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Dans « Walhalla », les fantômes n’en sont pas, mais sont des êtres humains venus du passé dans une maison qui est équipée d’un plancher-horloge, instrument de Balam, esprit du temps, ange de l’Ordre des Dominations déchu parce qu’il avait affirmé que les femmes étaient les égales des hommes.Les morts-vivants du « Démon des Morts » massacrent toute la population de Salem.
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Certaines scènes décrites sont un hommage direct au superbe film de Romero « La Nuit des Morts-Vivant ». De même, à l'inverse, le film «Evil Dead », n'est-il pas directement inspiré de l'œuvre de Masterton ?
On y trouve tous les ingrédients de son fantastique : le Livre maudit, la possession des corps et des âmes, la maison isolée dans une nature hos-tile.
Le début du roman « Le Démon des morts » rappelle ce film avec la scène de la balançoire qui grince au-dehors à deux heures du matin, ainsi que le magnéto-phone (détruit juste à temps par le vieux prêtre) qui psalmodie l'évocation faisant apparaître Belzébuth, le Seigneur des mouches.
Les démons utilisent les corps des êtres humains morts pour agir dans notre monde et pour effrayer les vivants. Les morts-vivants sont également présents dans les rêves, lieu des batailles avec le démon dans « Les Guerriers de la nuit ».
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Le vampirisme intéresse Masterton. Il le traite d'une façon très originale dans « Le Portrait du Mal ». Mais il s'agit d'un vampirisme particulier. L'éternité est fournie à la famille Gray par un tableau les représentant, peint par Walter Waldergrave, le peintre ami d'Oscar Wilde. Un bel hommage (un peu trop appuyé ?) à l'écrivain anglais et à son œuvre « Le Portrait de Dorian Gray ». Hélas, par un concours de circonstances, ce tableau leur est enlevé. Ces braves gens pourrissent donc vivants sur pieds... Pour garder une apparence convenable, ils ont besoin de peau humaine... « Le Silence des Agneaux » traite du même thème : être dans la peau des autres.
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Les terribles crimes qui se déroulent aux alentours du château des vampires rappellent le terrible Gilles de Rais, dont l'histoire est superbement traitée par l'écrivain français Huysmans dans « Là-Bas », roman sur l'occultisme et l'alchimie.
« Le Portrait du Mal » est également fascinant par la manière dont l'écrivain traite du vampirisme. La famille Gray, prête à tout pour la vie éternelle, « vivant » dans un vieux château gothique de la Nouvelle Angleterre, assemblée de fantômes mangés par les vers, mais éternels grâce à une œuvre d'art et à l'occultisme, permettra au héros, membre de la famille sans le savoir, d'atteindre aussi l'éternité.
L'art n'est-il pas éternel ? Accéder au monde représenté par les tableaux c'est accéder à l'éternité. Mais notre image (photo, portrait, peinture) nous prend toujours une partie de notre âme.
Ces histoires d'image présentes dans toute l'œuvre de Masterton renvoient aux œuvres de Jean Lorrain (« Histoires de Masques »), Hans Heins Ewers (« Le Cœur des Rois »), Marcel Schwob (« Le Roi au Masque d'Or » ; « Les Faulx-Visages ») et surtout le grand Ernst Theodor Amadeus Hoffmann dans « Princesse Brambilla ».
Etre dans la peau d'un autre... C'est parfois désirable et parfois terrifiant.« Votre image ne vieillit pas de l'intérieur (...) mais de l'extérieur (...) Votre visage vieillit à force d'être regar-dé, d'être photographié. » Thème développé dans une nouvelle de David J. Schow : « Lumière Rouge ». Une autre citation du « Portrait du Mal » : « Des personnes et des lieux créés dans des romans et des tableaux, si les lecteurs ou les spectateurs croyaient en eux avec une conviction suffisante, pouvaient effectivement se manifester dans le monde réel », ne peut-elle se comparer à une autre de Jean Ray dans « Malpertuis » : « Les hommes ne sont pas nés du caprice ou de la volonté des dieux, au contraire, les dieux doivent leur existence à la croyance des hommes. Que cette foi s'éteigne et les dieux meurent »...
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Il y a également des références au « Dracula » de Bram Stoker dans ce roman. Masterton multiplie les lieux et titre chaque chapitre du lieu de l'action et de la date. Ces titres de chapitre, complètement inutiles pour la compréhension de l'action, existent pour rappeler la structure de « Dracula », faite des journaux intimes des protagonistes.
Dracula est cité plusieurs fois dans « Sang Impur ». Une scène où des pêcheurs remontent à la surface d'un lac le corps écorché d'une victime de la famille des vampires rappelle la nouvelle « Sur l'Eau » d'un autre spécialiste des vampires, Guy de Maupassant.
Les corps des morts-vivants du « Portrait du Mal » se sont réfugiés dans l'eau glacée du bassin du jardin ; c'est au fond de la mer que repose le « Démon des Morts » dont le gardien est une noyée.
L'eau a toujours fasciné les fantastiqueurs. C'est le thème principal des « Puits de l'Enfer » où les démons arrivent par l'eau, envoyés par le plus grand des monstres aquatiques : Cthulu lui-même, décrit comme « un gigantesque ver noir », alors que le ver de Bram Stoker était blanc (« Le Repaire du Ver Blanc »).
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Mais l'eau, c'est aussi le miroir de nos âmes, c'est pourquoi, dans « Le Démon des Morts », Anne invoque le miroir en se regardant dans un bol d'eau pour lutter contre les démons.
Le déchirement des chairs et leur pourriture, le sang, la mutilation, l'horreur anatomique forment une base solide de la terreur sécrétée par les histoires de Masterton.
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La possession, thème présent dans toutes ses œuvres, exprime l'existence de l'autre monde lorsqu'il pénètre dans le nôtre. Cette question est abordée par H.G. Wells de manière subtile dans une saisissante nouvelle « La porte dans le Mur ».
Cette possession est, la plupart du temps, spirituelle. Dans « Manitou », elle est à la fois spirituelle et matérielle puisque l'homme-médecine, Misquamacus, « pousse » dans le corps d'une jeune fille pour revenir au monde matériel qu'il avait quitté en 1650.
Cette très belle histoire ressemble énormément à une nouvelle terrifiante d'Edward Lucas « White Lukundoo », dans laquelle un explorateur maudit par un sorcier africain voit pousser sur son corps des « démons » qui l'insultent et le menacent.
Certaines personnes sont tellement possédées qu'elles ne prennent pas seulement la voix, mais aussi le visage de l'esprit qui les possède. Certains individus privilégiés, comme les hommes-médecines Indiens, ont plusieurs vies et savent se réincarner jusqu'à sept fois avant de rejoindre la Grande Prairie, pardon... Le Grand Dehors, selon Masterton.
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Ainsi,
les rêves que nous faisons ne sont pas notre œuvre. Ils sont le fait des démons ou des hommes-médecine qui se réincarnent dans le secteur. Ce sont des avertissements, des signes envoyés par les prochains visiteurs. Alors, gare à vos rêves....
Dans « Les guerriers de la nuit » et ses deux suites, les rêves sont les champs de bataille du bien contre le mal. Dans le deuxième volet de la trilogie, « Les Rivages de la nuit », l’histoire res-semble beaucoup trop à celle de « Freddy Krueger » du film de Wes Craven « Les Griffes de la nuit ».
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Les contes pour enfant sont le recueil le plus riche des thèmes du fantastique. Masterton développe le thème d’ « Alice au pays des merveilles » dans « Le Miroir de Satan » et « Apparition », et, surtout, il consacre un superbe roman à un terrifiant conte d’Andersen : « La Reine des neiges », en y mêlant une mythologie nordique, celle du méchant Loki.
Dans ce roman, « Hel », qui parle de fantôme, l’écrivain évoque les problèmes de la création artistique (je cite) : « Les écrivains créent des mondes et excitent l’imagination des gens, et ensuite ils voudraient que ceux-ci les oublient ? Comment pourrait-on oblier ? » Il est curieux de noter encore une fois une ressemblance avec un thème traité par l’autre « Freddy » de Wes Craven : « Freddy sort de la nuit ».
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Dans plusieurs de ses romans, Masterton utilise le thème de la cartomancie, le Tarot dans « Manitou » et le « jeu de cartes de mademoiselle Lenormand » dans « Le Portrait du Mal ».
Les nouvelles annoncées par les cartes ne sont jamais bonnes, on s'en doute. Une autre influence d'Huysmans qui était également fasciné par le Tarot ?
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Masterton ne se contente pas de développer des mythes de la littérature fantastique (ce qui semble lui faire énormément plaisir) mais en profite pour traiter de sujets historiques, à sa manière.
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L'horreur de la guerre, la recherche maladive du meilleur moyen de destruction des hommes est le thème du « Jour J du Jugement », les militaires alliés à l'Eglise ayant « domestiqué » des démons pour faire la guerre à leurs côtés lors du débarquement en Normandie.
Et attention ! cela a toujours été le cas, lors de toutes les guerres, les « démons » se sont enrôlés dans l'armée qui a su leur offrir les sacrifices humains demandés. Ces sacrifices ne sont-ils pas négligeables en temps de guerre?
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Le fameux procès des sorcières de Salem en 1692 a toujours fasciné les amateurs de fantastique. Masterton en donne une explication démonologique dans « Le Démon des Morts ». Le démon responsable de cette « hystérie » revient semer la terreur de nos jours.
Le responsable c'est le puritanisme qui, à force de rechercher la punition des pécheurs, finit par s'allier avec le diable lui-même. Or, un des juges des sorcières de Salem, John Hathorne était l'aïeul du grand écrivain Nathaniel Hawthorne, né aussi à Salem. Dans toute son œuvre, Hawthorne reprend le thème de la malédiction due au péché, que ce soit dans « La Lettre écarlate », « Le Voile Noir du Pasteur », ou « La Maison aux Sept Pignons ».
Tout le roman de Masterton est basé sur une malédiction de ce type. Or il ne fait jamais allusion au romancier romantique Hawthorne sauf dans le nom de l'hôtel fréquenté par le héros : l'Hawthorne Inn. Mais peut-être que cet hôtel existe vraiment à Salem ?
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Le plus beau double hommage littéraire que Masterton ait rendu est contenu dans sa (courte...) nouvelle « Will ». Il y rend hommage à Lovecraft, bien sûr, et surtout à Shakespeare et aussi au « Faust » de Gœthe, puisqu'on apprend dans cette nouvelle que Will Shakespeare a fait, en son temps, un pacte avec Y'g Southothe (autrement dit, Yog-Sothoth selon Lovecraft) pour devenir célèbre. En échange, il donna la vie de son fils et logea le démon dans les caves du théâtre du Globe. Magnifique !

Enfin, dans un de ses meilleurs romans, « Manitou », Masterton nous donne une explication (jus-tification ?) très personnelle et très fantastique de la vic-toire des Blancs sur les Indiens
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Le héros principal des œuvres de Masterton est la Mort. Elle seule n'est jamais banale dans la vie. L'écrivain tente d'en montrer toute l'horreur, cultive l'angoisse qui entoure l'idée que l'on s'en fait et la terreur que suscitent les corps de ceux qui en ont été victimes. Mais ne de-vons-nous pas tous y passer ?
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« Le troisième (tableau) représentait un enfant dans son berceau, mort, tandis que sa mère, folle de douleur, se cachait le visage dans ses mains. Derrière la mère, sa face décharnée à peine visible du fait de son capuchon ombreux, se tenait la Mort, sa faux posée sur son épaule ». (« Le Portrait du Mal »)
La Mort et ses mystères n'est-elle pas le seul thème littéraire qui vaille la peine d'être traité ? Le plus fantastique ? Le seul fantastique ?
Par cette fascination pour la grande Faucheuse et pour les corps des humains qui en ont été les victimes, Masterton fait preuve des mêmes obsessions que Hans Heinz Ewers, le grand écrivain Allemand qui a soutenu les nazis, croyant ainsi soutenir l'Allemagne, apportant son appui intellectuel à la plus grande œuvre de mort de l'histoire de l'humanité.
Mais même le nazisme ne voudra plus de lui plus tard... H. H. Ewers a traité, dans ses nombreuses nouvelles (car lui, il savait écrire court...) et romans, tous les mythes que Masterton a repris dans ses romans : les noyés (« Le Noyé »), les vampires (« Vampir » ; « La Sauce Tomate »), les œuvres d'art nécromanciennes (« Le Cœur des Rois »), la possession (« La Suprême Trahison »), la malédiction (« Mandragore ») ; en résumé : les œuvres de la Mort...
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Le sexe est également très présent dans les romans de Masterton. On n’oublie pas qu’il a commencé sa carrière en écrivant des romans pornographiques. C’est le point faible de son style : il n’a jamais réussi à se libérer de cette manière de décrire les rapports sexuels.
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Ceci dit, à part dans le roman « Tengu », dans lequel la violence et le sexe apparaissent comme complètement gratuites, dans la plupart de ses œuvres, l’écrivain utilise la sexualité comme une base du fantastique.
C’est le cas dans « Les Guerriers de la nuit » où le diable (Yomauilt) viole les femmes pendant leur sommeil pour engendrer d’autres démons, et aussi dans « Hel », qui traite de manière perti-nente le problème de la pédophilie.
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Enfin, Masterton aime le cinéma fantastique. Il cite souvent des films dans ses récits. Il bat tous les recors de citations dans « Sang Impur » et il y utilise des scènes de certains films pour mieux décrire les siennes. Ainsi sont cités : « Zombie » (1978) de George Romero, « Scanners » (1980) de David Cronenberg, La Guerre des mondes (1953) de Byron Haskin, « Jurassik Park » (1993) de Steven Spielberg, « Indiana Jones et le temple maudit » (1984) de Steven Spielberg, « Des monstres attaquent la ville » (1953) de Gordon Douglas, « La Chose d’un autre monde » (1951) de Christian Nyby, « Les Dents de la mer » (1975) de Steven Spielberg.
Vous constaterez que Spielberg est cité trois fois ! Masterton cite également d’autres films comme « Les Tortues Ninja » et « Autant en emporte le vent »... Par ailleurs, l’écrivain cite souvent «L’inspecteur Harry** » comme antithèse de son héros, Luke le shériff.Masterton puise dans le fabuleux patrimoine de la littérature fantastique pour écrire ses romans. Il ne se contente pas d'en utiliser les mythes, il les renouvelle, les développe, les triture, les rend encore plus effrayants, terrifiants.
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Mais la terreur ne fait-elle pas reculer le mystère ?
Peut-on être critique dans ce genre d'article, même sur un auteur qui nous enchante souvent ?
Masterton souffre d'une manie très répandue chez les écrivains anglo-saxons : il écrit trop long parfois, beaucoup trop long.
Ainsi, certains romans peuvent être lus à partir de la cinquantième page sans dommage. A-t-on besoin de savoir ce que mange le héros, les meubles qui décorent son appartement et le moindre geste de sa vie quotidienne? Très ennuyeux parfois.
Cinq pages lui sont nécessaires pour écrire qu'une balançoire grince au-dehors à deux heures du matin... Le suspens dure un peu. C’est le cas dans « Les Guerriers de la nuit » et ses suites, où certains événements se répètent, une fois d’abord, par la narration de l’écrivain, ensuite par celle d’un ou même plusieurs personnages. On a parfois envie de tourner rapidement les pages...
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D'autre part, un certain nombre d'erreurs tendraient à montrer que Masterton écrit très vite, sans bien se relire.
Dans « Le Démon des morts », il y a de la buée sur une bouilloire chaude alors que la pièce devient froide ; cette inversion d'un phénomène naturel est sans doute due au démon.
Deux pages plus loin, il parle de fleurs de pommiers en été !
Dans « La Vengeance de Manitou », page cent vingt-quatre de l'édition Pocket, l'instituteur Saperstein prend trois photos des enfants possédés qui dansent dans la cour. Ces trois photos sont devenues cinq page cent quatre-vingts.

Enfin, Masterton ne sait sûrement pas que les vaches laitières restent à l'étable en plein hiver et ne broutent pas dans les prés, en Normandie et ailleurs (« Le Jour J du Jugement »).
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Contrairement à Lovecraft qui était raciste, Masterton aime les Indiens. Si, dans nombre d'œuvres de l'écrivain de Providence s'exprime puissamment l'eugénisme dont il faisait la base de l'intrigue, Masterton, lui, n'aborde jamais aucune question physiologique qui séparerait telle ou telle ethnie. A peine souligne-t-il les « pommettes hautes » de tel représentant de la communauté indienne d'Amérique.
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Masterton est révolté par le génocide des Indiens après la découverte de l'Amérique. Il en fait le thème central de trois romans : « Manitou », « La Vengeance de Manitou » et « L'Ombre de Manitou ». Il s'appuie sur la mythologie lovecraftienne pour créer une fascinante mythologie indienne basée sur la magie gestuelle et textuelle qui amène sur notre terre matérielle les esprits (les manitous) qui règnent sur le cosmos.
Extrait de http://www.inlibroveritas.net/
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Note :
Dernières lectures assez lointaines... surtout depuis "cellulaires de King"... Enfin, là, il est question de vampires... et généralement j'aime bien...

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