lundi 18 août 2008

Horace Walpole - Le château d’Otrante

souvenir de lecture
littérature fantastique, littérature gothique...


“Le château d’Otrante est un drame plastique, la forme la plus amère, la plus rugueuse, mais aussi la mieux taillée du malheur en amour.

Seuls immortels, les désirs vont leur chemin, malgré d’extraordinaires obstacles, malgré les rideaux du sang et les miroirs vides, la nature exclue, l’existence approximative, la vue inutile, les ancêtres vomis par l’Enfer, malgré la peur, l’héroïsme, la férocité, malgré le marbre des tombeaux et les squelettes, les désirs sans cesse au fil de la mort, cherchent à briser avec l’imaginaire.

Horace Walpole a été le précurseur du Roman noir : de Maturin (pour la mise en scène), de Lewis (pour la précipitation passionnée des événements), d’Ann Radcliffe (pour l’atmosphère et le droit à l’absurde) et même d’Achim d’Arnim (pour la froideur dans le bizarre).
Et quelques-uns des grands pans d’ombre du Château d’Otrante alimentent le terrible feu qu’allumèrent Sade, Poe et Lautréamont pour échapper au néant. Comme il n’y a qu’une grandeur, cela assure à jamais la gloire d’Horace Walpole.” Paul Éluard

Extrait
Manfred, Prince d’Otrante, avait un fils et une fille : celle-ci, très belle jeune fille de dix-huit ans, s’appelait Mathilde. Conrad, le Prince héritier, de trois ans plus jeune, était un garçon sans originalité, maladif et d’un avenir médiocre. Il n’en était pas moins l’idole de son père qui n’éprouvait pas la moindre affection pour Mathilde.

Manfred avait contracté, au nom de son fils, un mariage avec la fille du marquis de Vicence, Isabelle ; et ses tuteurs l’avaient déjà remise entre ses mains afin qu’il pût célébrer le mariage dès que le mauvais état de santé de Conrad le permettrait.

L’impatience avec laquelle Manfred attendait la cérémonie fut remarquée par ses voisins et sa famille. Celle-ci, à la vérité, redoutant la colère du Prince, n’osait s’exprimer sur cette hâte.

Presse
Obéissant à un courant nouveau, qui a déjà fait traduire Le Moine, de Lewis, à Antonin Artaud, un jeune homme de vive intelligence Dominique Cortichiatto, à qui de grands et immérités malheurs étaient, hélas ! promis, a donné tous ses soins à une traduction nouvelle du Château d’Otrante, qui devrait rester.

Ce jeune écrivain, charchant un lien entre le passé et l’avenir, attache aujourd’hui son nom à celui d’Horace Walpole et nous ramène à une époque, dont la nôtre n’est pas très éloignée. Il nous rend actuelle et présente cette figure curieuse d’un grand seigneur, qui touche à la cour de Louis XV et chez qui le romantisme apparaît comme une sorte d’écriture automatique.

Paul Éluard, dans sa préface, traite le roman du Livre de l’Invisible. Ainsi Mallarmé célébrait Beckford et son Vathek. Quel est le secret du charme de ces récits fantastiques pour qu’ils résistent au temps ? De telles anomalies nous prouvent que des œuvres sans perfection aucune, mais poétiques et singulières, ont parfois une survie plus longue que des chefs-d’œuvre consacrés. Edmond Jaloux, La Gazette de Lausanne, samedi 13 octobre 1945.

biographie

Horatio Walpole ou Horace Walpole (24 septembre 1717, Londres - 2 mars 1797), 4e comte d'Orford, fils de Robert Walpole, est un homme politique écrivain et esthète britannique.

Il a écrit Le château d'Otrante, qui a lancé la vogue du roman noir (gothic tale en anglais). On lui doit également le concept de sérendipité (serendipity en anglais, qu'on pourrait traduire par deux périphrases : découverte heureuse ou inattendue ou don de faire des trouvailles).

Walpole est le plus jeune fils du premier Premier Ministre britannique, Robert Walpole. Il étudie instruit au collège d'Eton, puis au King's College de Cambridge.

Son
homosexualité lui est révélée assez tôt, et il aurait eu des rapports avec le poète Thomas Gray et Henry Fiennes Clinton, 9e comte de Lincoln (futur second duc de Newcastle). Gray l'accompagne lors de son Grand Tour, mais ils se querellent, et Walpole retourne en 1741 en Angleterre, où il entre au Parlement. Il n'a aucune ambition politique, mais il demeure député après la mort de son père en 1745.

En dehors de la politique de son père, il est très dévoué au roi
George II et à la reine Caroline, prenant leur parti contre leur fils, Frederick, prince de Galles, dont Walpole parlera plus tard avec rancune dans ses mémoires.

La demeure de Walpole, Strawberry Hill, près de
Twickenham,
est un ensemble fantaisiste de style néogothique qui crée une nouvelle tendance architecturale.
En 1764, il publie son roman gothique Le Château d'Otrante (The Castle of Otranto), créant un style littéraire allant de pair avec l'architecture.

À partir de 1762, il fait paraître ses Anecdotes de peintures en Angleterre, basé sur le manuscrit des notes de
George Vertue. Ses mémoires de la scène sociale et politique géorgienne, bien que partisanes, sont une source de première main pour les historiens.
Il est aussi l'auteur de l'
épigramme souvent cité : « La vie est une comédie pour ceux qui pensent et une tragédie pour ceux qui ressentent. »

Grand défenseur du style gothique à l'époque pré-romantique, Walpole fit édifier, décorer et meubler de 1748 à 1753 sa villa, où il installa ses très importantes collections d'objets d'art; il en assura la rennomée en publiant une description; la demeure est le modèle du "Château d'Otrante", qui fut ensuite une source d'inspiration pour Byron et Walter Scott.
Son père a été créé comte d'Orford en 1742.

Son frère aîné, Robert, 2e comte d'Orford (vers 1701-1751), a transmis le titre à son propre fils, George, 3e comte d'Orford (1730-1791). Quand son neveu George meurt célibataire, Horace devient le 4e comte d'Orford.

Sa nièce Maria (1739-1809), fille de son autre frère Edward, épousa en 1ères noces le comte James Waldegrave (+ 1763) dont elle eut Elizabeth-Laura (1760-1816), qui épousa...le 4ème comte Waldegrave (1751-1789); le 7ème comte épousa Frances ( + 1879), qui fut voisine et amie intime d'Henri d'Orléans, duc d'Aumale, exilé en Angletere de 1848 à 1871, à qui elle légua le double portrait de la mère et de la fille commnandé par Horace à Joshua REYNOLDS, qui le peignit en 1761.

( n° 2 du catalogue de l'exposition "l'art anglais dans les collections de l'Institut de France", musée Condé, Chantilly, 13/10/2004- 3/01/2005, Somogy 2004, p.48, reprod. p. 49).

Une photographie de Philip Henty Delamotte (1820-1889) de 1863 montre ce tableau dans une pièce de Strawberry Hill.

Le titre de comte d'Orford s'éteint à la mort de Walpole (1797). Les Walpole ne sont pas liés à
Hugh Walpole (1884-1941), romancier populaire du XXe siècle. (wikipédia)
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Surgi de l'au-delà, un casque géant tombe dans la cour d'honneur du Château d'Otrante et tue le fils du prince.

Des guerriers de marbre descendent de leur socle et saignent du nez. Venus d'Angleterre à leur suite, un cortège de nonnes sanglantes, de spectres bruyants, de moines impudiques, d'inquisiteurs masqués, et d'orphelines ravies à leur couvent ou à leur fiancé...

Ce roman noir "terrifiant" déploie son concert de gémissements et d'enlèvements, de viols et d'assassinats dans un décor de cachots, caveaux, confessionnaux, cimetières, châteaux et monastères baignés par la lune ou assaillis par l'orage.
De cette masse de prodiges et méfaits entretenus par le fol engouement du public, émerge l'inspiration de quatre maîtres incontestés.

Horace Walpole, initiateur du genre avec Le Château d'Otrante (1764),
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Ann Radcliffe, spécialiste du surnaturel expliqué, et dont Le Confessionnal des Pénitents Noirs (1797) montre le triomphe de l'amour sur l'inquisition et ses chambres de tortures.
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Avec Le Moine (1795) de Matthew Gregory Lewis, l'intervention directe du diable porte le surnaturel à l'incandescence et l'amour jusqu'au blasphème. Le roman de la terreur a cédé la place au roman du Mal. Un Mal qui, dans Melmoth ou l'homme errant (1820) de C.R. Maturin, va quitter les lieux de l'inspiration gothique pour écraser des hommes sous leur destin aux quatre coins du monde.

Parmi les nombreux écrivains que le Roman Noir terrifiant a fascinés à l'aube du romantisme, de Balzac à Baudelaire en passant par Charles Nodier, Victor Hugo et George Sand, on retiendra l'auteur des célèbres Contes. Les Elixirs du Diable (1816) d'Hoffmann constitue l'hommage du Romantisme à un genre qu'on jugera frénétique et mal famé.
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Encore un très bon souvenir de lecture... pas loin de 40 ans ! et mon premier roman gothique... illustré par Dali.

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