samedi 13 septembre 2008

Mario de Carvalho - Le soleil se couche à São Paulo

rentrée littéraire septembre 2008
littérature étrangère : Brésil - coup d'oeil sur les sélectionnés


A São Paulo, un soir, la propriétaire d’un restaurant japonais aborde l’un des derniers consommateurs et lui demande : “Vous êtes écrivain ?”

Cette question inattendue va transformer le client en narrateur d’une histoire vertigineuse qui débute dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale et se poursuit aujourd’hui au Brésil.

Setsuko raconte un banal triangle amoureux : une danse de mort entre une jeune fille de bonne famille, le fils d’un industriel et un acteur ambigu et obscur.

Puis, progressant tortueusement vers son centre secret, la trame dévoile une autre intrigue faite d’arrogance et d’humiliation, dont les racines plongent dans l’histoire du Japon en guerre et ses conséquences sur l’émigration japonaise au Brésil.

Peu à peu le narrateur prend conscience que ce récit, concernant un paria, un cousin de l’empereur et l’écrivain Junichiro Tanizaki, est aussi sa propre histoire d’émigré japonais de deuxième génération, fondée sur l’humiliation et l’exil.

Il ira jusqu’au bout de cette narration surprenante qui est aussi sa seule chance de rédemption.


Bernardo Carvalho est né à Rio de Janeiro en 1960.

Il est écrivain et journaliste, et vit à São Paulo.

Il est l’auteur, entre autres, de Aberration, Mongolia et Neuf nuits.

Ses livres sont traduits dans 10 langues.



Les premières lignes
Je ne vois aucune métaphore dans ce que je dis. C'est comme si tout se trouvait dans l'ombre. Il y a eu un temps où je fréquentais un restaurant obscur, qui n'existe plus, appelé Seiyoken, dans une rue mal famée du quartier de la Liberdade.

La nourriture y était bonne, les prix honnêtes et le service sympathique, pour autant qu'on puisse dire, puisque nous n'en avons jamais été chassés.
Il y avait presque toujours de la place et il ne m'est jamais venu à l'esprit, ni à celui de mes camarades de faculté, que le boucan que nous faisions d'habitude après quelques verres de saké et de bière puisse déranger les autres clients.

Nous étions trop habités par nos convictions et trop aveugles pour réfléchir à deux fois avant d'élever la voix et de discourir sur des sujets qui n'intéressaient personne, à commencer par les serveurs, qui non seulement ignoraient le ton de nos dissensions ou, pire, de notre autosatisfaction, mais encore profitaient de ce que nous nous étranglions avec nos propres paroles pour sortir de l'ombre qui nous enveloppait et s'épaississait au fil des heures et aussi de notre ivresse (sans que nous nous en apercevions, les serveurs éteignaient progressivement les lumières) pour remplir nos verres vides sans se faire remarquer, s'assurant ainsi un pourboire plus généreux à la fin de la nuit et de notre soûlerie.

Quand nous reprenions nos esprits, nous étions déjà dans le noir.
Je me souviens d'un dîner particulièrement déconcertant où quelqu'un à la table criait que sans le nazisme le monde n'aurait ni compris ni apprécié les textes de Kafka.


Note :


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